1- Je voulais lui dire que j'ai beaucoup aimé son film et que je suis bien bouddhiste ! 

 Vous savez que le dalaï lama adore les sciences et il a dit « si la science donne tort à mes croyances alors je changerai mes croyances. »

 2-  Dans votre cinéma il y a beaucoup de questions sur le spirituel et le cosmique. 

 Vous avez raison, mes films sont une quête cosmique et spirituelle mais ma vie toute entière l'est. Et je suis très chanceux de trouver des partenaires et des mécènes qui me permettent de faire des films qui posent ces questions. 

 3- Et souvent vous montrez que les deux ne sont pas opposés, au contraire. 

Absolument, dans ce film il y a une scène où Sophie parle à Yann dans le laboratoire et qui montre justement que le scientifique et le spirituel peuvent avancer main dans la main. 

 4-  Vous semblez dire qu'il y a une réalité qu'on ne voit pas. 

Absolument, de toute façon nous sommes limités par nos cinq sens, ce sont les limites de notre espèce. Alors qu'il y a bien plus dans la vie que ce que nos cinq sens nous permettent de voir...et c'est en cela que le monde scientifique est là pour nous aider à aller au-delà. 

 5-  La science a montré par les quartz qu'on pouvait être partout à la fois. 

Si la science et les mathématiques sont exactes, eh bien cela veut dire qu'il y a des milliards de possibilités et donc des milliards de « moi » et donc je ne suis pas unique. La seule chose qui me rend unique c'est mon histoire, ma narration. 

 6- Vous commencez le film par un œil, est-ce justement pour nous montrer l'immensité du cosmos ? 

C'est vrai, pourquoi cet œil ? Je voulais dire en quelque sorte que l'œil est un organe que nous pensons complètement connaître mais en réalité nous ne le connaissons pas. Nous n'examinons jamais le pouvoir de l'œil ni la beauté de l'œil.

Je vais vous raconter une histoire qui est un peu une métaphore. Il y a deux étés, j'étais dans une des îles en mer Adriatique et je voyais toutes ces ruines romaines merveilleuses, je me promenais, je prenais des photos... Et puis sur la plage il y avait aussi les empreintes des dinosaures et je me suis mis à regarder d'un côté les ruines romaines et de l'autre les traces de pas des dinosaures. Je me suis dit que c'était dingue que la civilisation romaine n'ait jamais pris le temps d'examiner ces traces. Eux ignoraient la présence de ces lézards géants et pourtant ces preuves, ces traces étaient devant leurs yeux. Je me suis alors dit, qu'est-ce que nous, nous ne voyons pas de nos yeux ? Quels sont les dinosaures du XXI^e siècle ? 

 7-  Ce qui amène au lien entre le début et la fin du film. 

 C'est vrai que tout est éphémère. On peut regarder la fin de façon négative, penser qu'on ne comprendra jamais, il y a un côté comme ça paralysant mais en même temps, si on regarde le côté positif, on peut se demander ce que l'on va découvrir, ce que les futures générations sauront de plus que nous. 

 8-  Il y a aussi l'idée que quelque part, il y a quelqu'un qui nous correspond et ça c'est un principe du Tao. 

 Ce que je peux dire c'est vrai que dans mon film il y a une histoire vraiment très sombre qui a d'ailleurs été inspirée par le symposium de Platon qui est cette réunion de philosophes qui discutent de la nature et de l'âme sœur. Aristophane dit qu’au début, l'Homme avait 4 jambes, 4 mains et deux têtes, nous étions extrêmement puissants et l'histoire dit que Zeus s'est emporté quand il a vu que les hommes devenaient de plus en plus puissants et il a lancé la foudre qui les a coupés en deux. Il a dit que l'Homme serait alors condamné à courir le monde pour retrouver sa moitié. Je trouvais cette histoire très belle, car elle parle de l'amour et de la force de la spiritualité. 

 9-  Est-ce que vous appartenez au courant bouddhiste ? 

Je suis dans un trip complètement différent. Toute ma vie j'ai expérimenté des situations métaphysiques extrêmement étranges et difficiles à expliquer. Toute ma vie j'ai eu des visions qui m'ont permis de connaître des choses. J'ai toujours eu quelque chose en moi qui me disait quoi faire et qui me guidait, des visions dans ma tête... 

Interview réalisé par Patrick Van Langhenhoven au 40 Festival du cinéma Américain de Deauville retranscrit par Sarah Lehu et corrigé par Françoise Poul