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affiche Young Ones

Young Ones

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Un film de Jake Paltrow ,
Avec Michael Shannon,

Genre : Science-fiction
Durée : 1H35
États-Unis

En Bref

Il vient le temps perdu de la désolation, de la mort rongeant la terre aussi sèche que le soleil pointant du doigt le ciel vide sans nuages. C’est ici, dans ce coin du Midwest où autrefois l’eau coulait en rigoles de joie, le blé s’élançait vers le ciel, où les cotons blancs pleuraient des larmes de bonheur. Il ne reste rien que le vent et le sable soulevé, poussière égarée dans l’horizon. Ernest tente de survivre sur le sol desséché en attendant que la pluie approche ou que le gouvernement accepte d’amener l’eau. Si certaines terres meurent par le trop-plein de pesticides, les siennes espèrent encore le clair bruit du ruisseau pour renaitre. Pour l’instant, il  joue le colporteur sur le chantier, forant la nappe où coule le précieux liquide. Il apporte aux ouvriers l’alcool pour oublier le dur labeur et des petits riens qui se transforment en île où accoster pour tenir les jours de désespoir. La mort du vieil âne pouvait mettre un frein à son boulot, mais une machine remplace la bête et l’espoir reprend. Il ne lui reste que son fils et sa fille pour supporter le trop-plein d’une ancienne faute, une femme paralysée clouée à l’hôpital pour un soir de trop plein de liquide ambré. Au bord de la frontière, la vie est rude et dans l’ombre sommeillent des rancœurs, des biles noires inassouvies. Elles attisent l’appétence, l’envie, l’espoir d’un autre monde plus souriant à n’importe quel prix. Flem Lever, fils de l’ancien propriétaire, petit ami de la fille d’Ernest est peut –être la tempête qui se lève et qui n’épargnera personne. La jalousie le ronge et le pousse vers ce précipice de haine d’où l’on ne revient jamais. Dans ce drame qui se noue, un innocent, Jérôme le fils d’Ernest représente la clef qui ouvrira les portes où il trouvera derrière les réponses aux tourments d’aujourd’hui. Les pions sont en place, les dieux peuvent jouer la pièce, la même histoire depuis Caïn et Abel, Abraham et Moïse.


La science-fiction semble prendre un nouvel élan, plus centré sur les univers apocalyptiques, elle imagine ce que seront nos lendemains. Pour l’instant, ils ne seront pas du tout souriants. Young Ones s’empare de la fin de l’abondance de l’eau qui, avec la famine, s’annoncent comme les prochaines guerres de l’humanité. Ici la terre verte ressemble au désert où rien ne pousse. Les raisons ne nous sont pas avancées, guerre ou catastrophe écologique. Le monde de Jake Paltrow est un univers où l’état central décide de votre sort et se centralise sur ceux où l’eau coule. Comme le dit un slogan à la frontière, notre état est encore humide. Au-delà, comme dans le bon vieux temps de l’ouest sauvage, c’est un monde dur et sans concession. Nous le comprenons dès l’ouverture où le premier plan, un soleil criant en plein cadre rappelle celui de Sam Raimi dans Mort ou vif. Jake Paltrow appartient à ces réalisateurs cinéphiles, il n’hésite pas à jouer avec les références à ses pairs.

Ce sont les gros plans, des regards comme chez Sergio Leone, même sens de l’espace où se noie le regard comme dans les westerns classiques de Ford en particulier. C’est le style qu’il privilégie pour nous raconter en trois portraits son histoire de trahison, de rancœur, de blessures portées comme un fardeau et d’innocence. Nous pensons, sans que l’aspect religieux n’apparaisse, aux premiers récits bibliques, la tragédie antique et forcément à ce bon vieux Shakespeare. Le décor étant posé, nous évacuerons tout de suite les personnages féminins, la fille d’Ernest amoureuse rebelle. La mère marionnette au bout de son câble  est condamnée comme une prisonnière à un tour de la cour et retour  au lit où sa paralysie la cloue. Comme dans le western classique, elles n’ont rien à dire et jouent plutôt les marionnettes que les hommes animent au gré de leurs envies. La fin ouvre une autre perspective pour elles, dans ce monde sec et sans cœur, elles apportent l’espoir d’un avenir, d’une âme.

Le film de Jake Paltrow s’inscrit dans le renouveau du cinéma indépendant américain, l’école de Dallas. Nous pensons à Jeff Nichols Mud, Les bêtes du sud  sauvage de Benh Zeitlin, Enfant de Terrence Malick. Il découpe son sujet en trois parties presque identiques le père, le gendre et le fils, trois figures différentes dans un monde revenu à l’état sauvage. Ernest est marqué par une faute ancienne, la paralysie de sa femme due à son penchant pour l’alcool. Il représente la figure de la rédemption que nous retrouvons dans le western moderne, impitoyable. Il se consacre à ses enfants, le dernier lien qui le relie à la vie et celle de se battre pour leur offrir un monde nouveau. Nous retrouvons l’image de la famille chère au cinéma américain. C’est un homme rude, personnage de la frontière entre deux mondes, il doit trouver sa place.

Il a connu l’ancien monde vert et pense que pour survivre, il ne faut rien laisser passer. Il place tous ses espoirs dans son fils, car c’est aussi une histoire où la paternité tient une place importante. La division en chapitres rapproche le film de la littérature, et pour ce qu’il laisse suinter, du style des auteurs du sud. Flem Lever c’est la figure du mauvais garçon prêt à survivre par tous les moyens. Il se sent spolié des terres que possède Ernest ayant autrefois appartenu à son père. Il trempe dans des combines louches et n’hésite pas à tuer pour arriver à ses fins. Il est marqué par la dureté de cette frontière où il est né et qui ne fait pas de cadeau. Il changera avec l’espérance d’un enfant à venir.

Le dernier, Jérôme, le fils d’Ernest, représente l’avenir, l’innocence, son chemin est celui de l’initiation. La transmission marque fortement les trois histoires, ce que l’on a gardé, ce que l’on laisse à nos fils et derrière nous. Aucun des personnages n’est ni tout blanc, ni tout noir, le réalisateur leur donne du relief, la notion de rachat de la faute parcourt aussi le récit. Mais cette dernière laisse-t-elle vraiment notre âme en paix ? Il choisit des acteurs comme Michael Shannon, déjà vu dans Talk Shelter ou Mud, et des jeunes prometteurs qui n’hésitent pas à se mouiller dans des projets moins formatés comme Kodi Smit-McPhee à l’affiche de La planète des singes, Nicholas Hoult Xmen, et Elle Fanning Maléfique et Super 8. Young Ones est la très bonne surprise de cet été, petit film à soutenir, il est riche dans son discours et sa forme. Deuxième film du réalisateur, il n’est pas exempt de défauts, qui ne nuisent en rien au récit et n’intéresseront que les cinéphiles pointus. C’est une histoire de survie et d’espérance, d’attente en un monde nouveau quand la pluie viendra. À leur manière, les fils recherchent l’eldorado perdu des pères.

Patrick Van Langhenhoven

Note du support :
3
Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 2.40, Format DVD-9
Langues Audio : Anglais, Français Dolby Digital 5.1
Sous-titres : Français
Edition : Potemkine

Bonus

Scènes coupées
Entretien croisé entre les réalisateurs Jake Paltrow & Wes Anderson

Titre original : Young Ones

    Réalisation : Jake Paltrow

    Scénario : Jake Paltrow

    Direction artistique : Sharon Lomofsky

    Décors : Emilia Roux

    Costumes : Diana Cilliers

    Montage : Matt Mayer

    Musique : Nathan Johnson

    Photographie : Giles Nuttgens

    Son : Julian Slater

    Production : Michael Auret et Tristan Lynch

    Sociétés de production : Quickfire Films, Spier Films et Subotica Entertainment

    Société de distribution : France Potemkine Films,  États-Unis Screen Media Films, Royaume-Uni Signature Entertainment

    Budget :

    Pays d’origine :  Royaume-Uni,  Afrique du Sud et Irlande

    Langue originale : anglais

    Format : couleur - 2.35 : 1 - Dolby numérique - 35 mm

    Genre : science-fiction

    Durée : 90 minutes

Distribution

     Nicholas Hoult : Flem Lever

    Elle Fanning : Mary Holm

    Michael Shannon : Ernest Holm

    Kodi Smit-McPhee : Jerome Holm

    Aimee Mullins : Katherine Holm