Wendy s’ennuie derrière sa fenêtre. Elle regarde passer les trains s’enfuyant vers un horizon plein de promesses. Un soir, elle voit son petit frère Thomas suivre une silhouette et disparaître dans le lointain. Il est peut-être parti pour devenir pirate ! C’est ainsi qu’à son tour, elle suit l’étrange garçon en compagnie des jumeaux, James et Douglas. Elle embarque pour un voyage extraordinaire au bout de la voie ferrée par delà l’océan. Wendy et ses frères débarquent sur une île perdue. Peter leur promet une jeunesse éternelle, la magie du rêve et la liberté. Ils ne reviendront jamais auprès de leur mère, car partir c’est vieillir. Quitter l’insouciance, la folie de la jeunesse et le mouvement, c’est vieillir. Wendy et les jumeaux s’habituent à leur nouveau monde, découvrent Mère, un monstre veillant sur les enfants perdus. Ils ne sont pas seuls. Ils ont rejoint la bande de Peter Pan et les autres enfants perdus volant sur la vague de l’insouciance. Jusqu’au jour où l’un des jumeaux disparaît, laissant son double éploré vieillir. Il rejoint les autres enfants devenus vieillards, prêts à le suivre pour tuer Mère et retrouver l’éternelle jeunesse. Peter et Wendy devront se battre pour sauver le monstre magique des abysses qui les protège. La fin de Mère marquerait la fin du monde de Peter Pan.
« Le train file, des enfants enfuis loin, très loin, au bout du monde » Wendy.
« On a parlé de ces moments où l’on sent qu’on est en train de grandir – ces moments où l’on prend conscience que le père Noël n’existe pas. Parfois, dès qu’on cesse de croire à quelque chose, celle-ci n’existe tout simplement plus. Et puis on vieillit parce qu’on commence à renoncer à certaines choses et que nos jeunes années, en quelque sorte, disparaissent. » Benh Zeitlin.
Benh Zeitlin marque les esprits en 2012 avec un premier film surprenant, Les bêtes sauvages du Sud, voyage initiatique d’une petite fille au cœur du bayou. Il obtient le Grand Prix et celui de la Révélation au Festival du Cinéma américain de Deauville en 2012. Neuf ans plus tard, il surprend de nouveau avec cette réinterprétation de Peter Pan. Nous retrouvons les thématiques évoquées précédemment, l’enfance, la nature, la mère, les mythes et les paysages de la Louisiane. L’histoire est vue à travers les yeux de Wendy, prisonnière d’un monde sans avenir, le café de sa mère où les enfants s’ennuient. Ils quittent la chaumière pour partir à l’aventure en suivant un petit garçon, Peter Pan. Nous retrouvons les figures incontournables de J.M Barrie, sous d’autres identités pour certains. Nous assistons à la naissance du capitaine Crochet et découvrons la raison de sa rivalité avec Peter Pan. Pour le reste, c’est une autre histoire que nous propose Benh Zeitlin, entre le mystère de la nature, le volcan, l’océan des origines et un monstre marin nommé Mère. C’est le conflit entre les deux pôles de la vie, l’enfance et la vieillesse. A la fin du récit, Wendy comprend que la plus grande des aventures est tout simplement celle de la vie.
L’enfance devient le territoire de l’apprentissage et de la construction de l’adulte que nous souhaitons être. Pour Wendy, la figure de la mère reste celle d’un idéal à atteindre. Elle la retrouve avec la mère biologique du début de l’histoire. C’est celle qui raconte des histoires, vous chérit, vous aime pour ce que vous êtes. C’est aussi la mère mystique, monstre marin protecteur rempli de magie. Chez Benh Zeitlin, le mythe n’est jamais loin celui du syndrome de Peter Pan, mais il s’inspire aussi des plus anciens remontant aux origines du monde, grotte ornée, main posée sur la pierre, chamanisme. Les forces de la nature incarnées par le volcan et l’océan sont des personnages à part entière. L’idée de fuite en avant est représentée par le train filant vers un horizon inconnu. Nous retrouvons la notion de préservation de la nature, d’écologie comme dans Les bêtes sauvages du sud. On retrouve avec les aurochs des Bêtes sauvages du Sud, le voyage, la route comme éléments d’initiation, et la vie.
Il choisit ses acteurs dans la vie, ce qui leur donne cette force de l’innocence et une liberté de jeu. Wendy n’abandonne pas ses rêves d’enfants en grandissant. Ils se transforment seulement et quand, à leur tour, ses enfants partent pour le pays imaginaire, c’est comme un passage de témoin d’une génération à une autre. Elle est trop vieille pour embarquer dans l’aventure, peut-être que le miracle ne se produit qu’une fois. Depuis Les bêtes sauvages du sud, Benh Zeitlin semble être moins évasif sur l’empreinte du mythe dans son œuvre. Wendy reste une histoire particulière. Nous espérons qu’il ne faudra pas attendre neuf ans avant le prochain voyage.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : Wendy
Réalisation : Benh Zeitlin
Scénario : Benh Zeitlin, Eliza Zeitlin, d'après un roman de J. M. Barrie
Photographie : Sturla Brandth Grøvlen
Montage : Scott Cummings, Affonso Gonçalves
Musique : Dan Romer, Benh Zeitlin
Pays d'origine : États-Unis
Langue originale : anglais
Format : couleur
Genre : fantasy
Durée : 111 minutes
Dates de sortie : 23 juin 2021
Distribution
Devin France (VQ : Lhasa Morin) : Dorothea Fields
Elle Fanning : Julie : Wendy Darling
Tommie Milazzo : Baby Wendy
Allison Campbell : Wendy adulte
Yashua Mack (VQ : Jacob Beaudry) : Peter Pan
Gage Naquin (VQ : Lorik Saxena) : Douglas Darling
Gavin Naquin (VQ : Adam Moussamih) : James Darling
Kevin Pugh : capitaine James Hook
Ahmad Cage (VQ : Léo Meunier): Sweet Heavy
Krzysztof Meyn : Thomas
Romyri Ross (VQ : Mali Paquin-Soutière): Cudjoe Head
Lowell Landes : Buzzo
Shay Walker : Angela Darling
Cleopatra King Welch (VQ : Jade Brind'Amour) : Jane