Loin de la Corse idéalisée pour les touristes, la jeunesse de l’île tente de trouver sa route et de construire une vie où la violence morale et physique s’invite parfois. Stéphane a quitté sa terre natale pour ne pas mourir, sous le poids des menaces. Il se réfugie à la capitale, loin de son passé de militant et de la lutte des différentes tendances. La mort de Christophe de manière violente, un ami d’enfance, un vieux camarade de route, de tous ses combats d’avant la fuite. Le sang appelle le sang, la vengeance devient comme un gène, après l’enterrement, il faudra solder les comptes. Est-ce si facile de quitter sa planque pour de nouveau s’exposer aux grands jours en sachant que la mort vous guette à chaque pas ? Il existe des liens qui sont au-dessus de tout cela. C’est l’occasion pour Stéphane de remonter le temps, de revoir ce jeune garçon, petit bourgeois promis à un avenir bien sage. C’est la bande et ses coups à la petite semaine, c’est la rencontre avec un chef militant porté par un discours engagé sur la terre et les liens du sang poussant les jeunes dans la radicalisation politique. 1997, le mouvement sort de l’ombre, la bande oublie la délinquance pour la lutte politique. C’est la longue route qui enfle de plus en plus, petit torrent de montagne emporté dans sa chute qui ne s’arrête pas. À la fin il ne reste qu’une gagnante, la mort.
« Aujourd’hui qu’est-ce que tu peux faire de bien dans ta vie. Te battre pour ton île et pour ton peuple. »
Après les Apaches Thierry de Peretti, déjà en Corse, s’inspire de l’histoire de Nicolas Montigny, un jeune militant nationaliste assassiné à Bastia en 2001. Une vie violente est d’abord la quête d’un jeune garçon qui se laisse emporter dans un chemin de violence au nom de son amour pour son île. C’est aussi la complexité de la Corse que nous explique le réalisateur à travers le regard de Stéphane. Une route complexe où la terre et le sang semblent tresser les fils d’une histoire qui touche au cœur et à l’âme. Nous comprenons dans un premier temps qu’il est bien difficile de trouver un sens, une origine dans ses méandres compliqués. Il faudra être attentif aux différents mouvements, opportunités qui dévoilent de nouvelles pistes qui finissent par égarer le néophyte.
Une certitude apparaît, la chose est si complexe qu’un seul film ne suffirait pas à en démonter les rouages. Pourtant tout en nous proposant une histoire nous rappelant les tragédies grecques où l’honneur, les liens tissés avec les autres, la terre et l’amour deviennent l’essentiel pour bâtir une vie. On ne meurt pas pour des futilités, mais pour garder l’honneur de l’histoire de nos pères. C’est une histoire d’hommes où les femmes s’effacent dans l’ombre, gardiennes du foyer et des enfants. La violence éclate, explose au sens propre et figuré, la parole demeure aussi importante, elle bâtit le terreau où la graine peut pousser. Elle choisit le chant des armes ou des urnes, l’éternelle question entre une lutte armée sans pitié et celle qui passe par le dialogue. Le choix des acteurs, souvent de jeunes inconnus, corses, est judicieux et leur permet de livrer une partition qu’ils connaissent de loin ou de près.
Dans la dernière partie, cette assemblée de femmes, chœur antique scandant la voie du malheur auquel nul n’échappe, pleure le destin d’une vie éphémère sur laquelle elles ne peuvent qu’offrir leurs larmes en pénitence à la perte d’un fils, d’un mari. Une vie violente nous éclaire sur la Corse et cette incapacité à sortir pour l’instant de la voie du sang versé. Nous comprenons mieux la complexité politique de cette île et combien la question se réglera sur le long terme, si nous apprenons à oublier nos images utopiques pour accepter celles de la réalité. Il reste le voyage universel d’un jeune homme plein de promesses, qui ne verra jamais ses rêves se concrétiser car la mort les rattrape à la vitesse d’une balle.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus vidéo:
7 scènes coupées
making-of sur le tournage
entretien du réalisateur (53min)
« Lutte Jeunesse » de Thierry de Peretti (57min)
Titre original : Une vie violente
Réalisation : Thierry de Peretti
Scénario : Thierry de Peretti et Guillaume Bréaud
Décors : Toma Baqueni
Costumes : Rachèle Raoult
Photographie : Claire Mathon
Montage : Marion Monnier
Musique : Frédéric Junqua
Producteur :
Coproducteur : Jean-Étienne Brat, Delphine Leoni, Olivier Père et Remi Burah
Producteur délégué : Marie Lecoq et Frédéric Jouve
Production : Les Films Velvet
Coproduction : Arte France Cinéma et Stanley White
Distribution : Pyramide Distribution
Pays d’origine : Drapeau de la France France
Format : couleur
Genre : Thriller dramatique
Durée : 113 minutes
Dates de sortie : 9 août 2017
Distribution
Jean Michelangeli : Stéphane
Henry-Noël Tabary: Christophe
Cédric Appietto: Michel
Marie-Pierre Nouveau : Jeanne
Délia Sepulcre-Nativi : Raphaëlle
Dominique Colombani : François
Paul Garatte : Marc-Antoine
Jean-Étienne Brat : Micka
Anaïs Lechiara : Vanessa
Paul Rognoni : Maître Patrice Guidicelli