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affiche Suite Française

Suite Française

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Un film de Saul Dibb ,
Avec Michelle Williams, Kristin Scott Thomas, Matthias Schoenaerts ,

Genre : Guerre
Durée : 1h47
Royaume-Uni

En Bref

C’est d’abord la fureur de la guerre jetant sur les routes des millions de civils en fuite. La longue cohorte s’élance sur les routes de France entre les champs de blé et le fleuve de bitume en quête d’un village, d’une ville où poser son âme. Les avions ennemis n’hésitent pas et frappent de leur staccato mortel les files de ces damnés en route pour un avenir incertain.

Lucile Angelier les croise en compagnie de sa belle-mère dans leur sortie pour récupérer les loyers de leurs propriétés. La guerre semble glisser sur elle, trop lointaine. La voilà pourtant qui frappe à sa porte. Hier elle attendait des nouvelles de son mari prisonnier, aujourd’hui le poids de l’occupation la rappelle à la réalité du drame de ces sans-abri. La guerre noire, les privations, un ennemi conquérant sûr de tout, arrogant l’éloignent d’abord. Elles sont obligées de loger un lieutenant. Bruno Von Falk s’avère un homme cultivé, aimant la musique. Arrivera-t-elle à résister ou succombera-t-elle au charme de cet esthète ?

Pendant qu’un couple de métayers résiste ne cède pas, elle finit, sous le poids de trois petites notes et de révélations sur un amour bafoué, par lâcher prise. Alors, le beau Bruno prendra son cœur et tentera le diable niché dans son âme pour l’emporter dans un monde où la guerre ne serait qu’un cauchemar. Elle est bien réelle, cruelle, sans pardon et la rappelle à son devoir, il lui faudra choisir son camp. Il lui faudra noyer son cœur dans le flot des sentiments ou dans le sang de la Résistance.


Il faut attendre que ses filles le découvrent et le publient. D’une facture assez classique, le film manque de relief, se contentant de retranscrire une époque sans toucher à sa noirceur ni à ses élans du cœur qu’il révèle parfois. Michelle Williams demeure en surface et finit par nous éloigner de son histoire d’amour autour de trois petites notes. C’est donc ailleurs, dans les thématiques secondaires, que nous trouverons le plaisir et un peu d’originalité. Suite française ne représente qu’une partie du roman d’Irène Némirovsky, écrit de juin 1940 à 1942 à sa mort en déportation.

Il obtient en 2004, année de sa parution, le prix Renaudot. Le livre de Némirovsky dépeint la société de l’époque dans une écriture moderne. Il explore les travers de cette société, les haines et travers d’une population jetée sur la route avec l’essentiel de toute une vie pour bagage. Il ne renoue pas avec la force du roman, se contentant d’un regard sans âme, manquant cruellement de ferveur sur un monde où nos recoins les plus tordus trouvaient à s’épancher.

Matthias Schoenaerts,  attiré sans doute par le noble sentiment (voir l’interview) tente de construire un personnage plus en relief que d’une seule teinte. L’intérêt vient du couple de métayers, Benoit et sa femme, qui finissent par focaliser le spectateur sur leur histoire, évitant au film de sombrer dans la simple anecdote. Kristin Scott Thomas, elle aussi, compose une femme dure, sans pitié, avide, préservant dans la tourmente l’héritage qu’elle léguera à son fils prisonnier. Elle finit par prendre une autre teinte au fur et à mesure qu’elle comprend que le conflit ne durera pas que l’espace d’un été. C’est donc ailleurs, dans les thématiques secondaires, que nous trouverons le plaisir et un peu d’originalité. Le reste ressemble à ces films, nombreux sur le sujet.

Nous retrouverons tous les travers d’une époque, les collaborateurs de la première heure et de la dernière. Il aligne les figures classiques : les résistants anonymes, la petite fille juive et sa mère, l’appât du gain, l’argent facile fait sur le dos des exilés, les officiers allemands imbus de leur rôle de conquérants, ceux moins enclins à avilir une population à terre. Le film brasse cette masse de nos sales petits travers, de nos nobles envolées, sans jamais creuser ou changer de forme pour ce noir et blanc de notre âme jouant sa partition de salopard ou de saint. La Duchesse du même réalisateur semblait plus inspiré sur une époque historique charnière. Jamais l’aspect de la musique reliant les deux personnages principaux n’est utilisé pour, dans ce chaos, ce chant de mort, briser les ténèbres par ses notes d’un printemps qui ne vient pas, véritable déclaration d’amour. La reconstitution historique est impeccable, mais ne suffit pas à sauver le film.

Il nous ramène à nos heures sombres, aux comportements de nos ainés et en écho, à tous ces lieux où la guerre fait rage et détruit tout. Crime impardonnable, il vaudra à de nombreuses femmes, gamines à la fin de la guerre, de se retrouver nonnes de la haine avec leur crâne rasé. Foule hurlante, il interroge sur une époque et sa barbarie,  victimes sacrificielles ou coupables avérées ? Vous pouvez lire sur le sujet Les tondues, carnaval moche d’Alain Brossat édition l’Harmattan, de Gérard Leray et Philippe Frétigné La tondue 1944-1947, Vendémiaire. L’intérêt du sujet était justement d’explorer ce sentiment dépassant la guerre quand il était sincère. L’amour se fout de celle-ci. Peut-on aimer l’ennemi ? Comment résister, ne pas céder, peut-on d’ailleurs le faire ? C’est autant de questions existentielles, de débats en sortie de salle avortés.

 Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
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Titre : Suite française

    Réalisation : Saul Dibb

    Scénario : Saul Dibb et Matt Charman, d’après le roman Suite française d'Irène Némirovsky

    Décors : Michael Carlin

    Costumes : Michael O'Connor

    Maquillage : Jenny Shircore

    Casting : Daniel Hubbard

    Photographie : Eduard Grau

    Montage : Chris Dickens

    Musique : Alexandre Desplat

    Production : Andrea Cornwell, Michael Kuhn, Xavier Marchand et Romain Bremond

    Sociétés de production : Coproduction Entertainment One ; TF1 Droits Audiovisuels ; Weinstein Company ; BBC Films

    Sociétés de distribution : The Weinstein Company (USA) ; TF1 (France), Entertainment One (Royaume-Uni, Espagne et Canada)

    Budget : 20 millions de $1

    Pays d’origine : France, Royaume-Uni, Belgique

    Langue originale : anglais, allemand

    Format : couleur

    Genre : Drame

    Durée : 107 minutes

Distribution

     Michelle Williams : Lucile Angellier

    Matthias Schoenaerts: Bruno von Falk

    Kristin Scott Thomas : Madame Angellier

    Sam Riley : Benoît

    Ruth Wilson : Madeleine

    Margot Robbie : Céline

    Tom Schilling : Kurt Bonnet

    Lambert Wilson : le vicomte de Montmort2

    Harriet Walter : la vicomtesse de Montmort

    Cédric Maerckx : Gaston Angellier, fils de Madame Angellier et mari de Lucile

    Eileen Atkins : Denise Epstein

    Deborah Findlay : Madame Joseph