Le monde est en guerre contre une nouvelle menace à laquelle personne n’échappe, le terrorisme. Il s’infiltre dans le pays par d’autres routes comme la frontière mexicaine. Il profite des cartels mexicains possédant la main mise sur cette nouvelle manne d’émigrants. Dans l’ombre, l’oncle Sam convoque le diable à la table des négociations souterraines pour trouver une autre solution. Le deal est simple, provoquer une nouvelle guerre des cartels. Une fois les trafiquants affaiblis, il ne restera plus qu’à donner un grand coup de balai final. Pour cela, en haut lieu, le ministre de la Défense convoque son exécuteur des basses besognes, Matt Graver. Votre mission, si vous l’acceptez, sera de déclencher l’apocalypse à la frontière mexicaine. Un petit kidnapping, sous des apparences trompeuses, et la mèche s’allume. Matt appelle à la rescousse le diable en personne, Alejandro, tueur sans âme qui n’hésite pas à tremper ses mains dans le sang. L’affaire se complique quand le gouvernement comprend qu’il vient d’ouvrir la boite de Pandore et décide de faire marche arrière. Il est trop tard pour éviter l’explosion et le diable est dans la nature, assoiffé du sang des démons du cartel. Bienvenue en enfer, quand l’horizon se teinte du rouge de la pénitence. Il n’existe aucune repentance, il ne reste juste qu’à assumer et voir le ciel s’embraser.
Devant le succès de Sicario, une suite a été envisagée assez rapidement. Elle ouvre la voie à une nouvelle franchise qui n’est pas déplaisante. Stefano Sollima évite à celle-ci de sombrer dans le banal film de cartel, sans toutefois reprendre la noirceur de Denis Villeneuve. Dans la première version, Kate Macer se retrouvait confrontée à la lisière du bien et du mal. Sicario nous interrogeait sur la frontière, au cœur de l’histoire entre les États-Unis et le Mexique, au propre comme au figuré. Dans la suite, la question se retrouve, moins emblématique. Changement de présidence, on ne s’interroge plus sur le bien et le mal. Il est évident que pour combattre les ténèbres, il faut sortir le diable de sa boite. Il faut faire face à une nouvelle menace, une police corrompue de l’autre côté du Rio Grande, des voleurs de bétail devenus trafiquants et passeurs d’âmes en quête de l’Eden. Les méthodes importent peu et s’il faut se salir les mains, c’est dans l’ombre, au cœur de la nuit que dansent le diable et ses démons. La nouvelle thématique est bien de savoir jusqu’où plonger dans la fosse à purin sans sentir le lisier. Il est impossible d’arrêter une tempête portée par un vent mauvais.
Il relance l’idée des chiens fous que le gouvernement peut lâcher sur ses proies sans se soucier du bien ou du mal. Une fois le feu dans la savane, il devient impossible de le maitriser. C’est aussi le visage d’une Amérique émancipée de ses mauvais travers, le mal est un bien nécessaire. Pour combattre les barbares aux portes de la ville, il faut d’autres barbares. C’est une question qui pourrait figurer au prochain bac de philosophie. Elle hante toujours nos sociétés face à la pire des guerres, celle du terrorisme sans scrupule et sans humanité. Dans ce cadre, des figures incontournables apparaissent dans le jeu de cartes. Alejandro le tueur à gages qui ne recule devant rien. Matt, aux ordres de son pays, mais jusqu’à quel point ? Peut-on sacrifier l’amitié, les guerriers les plus fous ont-ils peut-être une âme ? Stefano Sollima, réalisateur de Suburra, A.C.A.B: All Cops are Bastards, et des deux séries, Romanzo Criminale et Gomorra, connaît bien la question. Elle se retrouve souvent au cœur de sa filmographie. Entre polar urbain, film de mafia et western, particulièrement sur sa seconde partie, Sicario trouve sa route. Sans avoir la noirceur du premier, il nous interroge malgré tout sur la part sombre de l’humanité. Dans cette galerie, les figures de la fille d’un membre du cartel et d’un jeune Sicario en devenir me semblent pour ma part les plus intéressantes.
Elle commence comme un petit démon qui n’aura aucun mal à prendre la place de son père. Elle finit peut-être dans cette route au cœur du mal par se teinter d’humanité. À l’inverse, le jeune garçon bascule de l’innocence aux légions des ténèbres sur le même principe que les enfants de Gomorra. Nous regrettons la disparition de Kate Macer, mais comme le dit le scénariste. « Ce fut ma décision et je vais un jour devoir lui en parler. Son histoire était terminée... Je n’arrivais pas à trouver une façon d’écrire son personnage d’une façon qui rendrait justice à son talent d’actrice. [...] Que faire après ? Elle déménage dans une petite ville, en devient le shérif, se retrouve kidnappée et vous avez Taken ! » Sicario La Guerre des Cartels mélange agréablement le film d’action pur et dur avec un minimum de réflexion, une nouvelle voie pour des blockbusters plus intelligents.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus:
Titre original : Sicario: Day of the Soldado
Titre français : Sicario : La Guerre des cartels
Titre de travail : Soldado
Réalisation : Stefano Sollima
Scénario : Taylor Sheridan
Direction artistique : Marisa Frantz
Décors : Kevin Kavanaugh
Costumes : Deborah Lynn Scott
Photographie : Dariusz Wolski
Montage : Matthew Newman
Musique : Hildur Guðnadóttir
Production : Trent Luckinbill, Thad Luckinbill, Molly Smith et Denis Villeneuve
Productrice déléguée : Ellen H. Schwartz
Sociétés de production : Black Label Media, Lionsgate, Rai Cinema et Leone Group2
Société de distribution : Lionsgate (États-Unis) et Metropolitan Filmexport (France)
Pays d'origine : États-Unis
Langues originales : anglais, espagnol
Format : couleur
Genre : action, policier
Durée : 122 minutes
Dates de sortie : 27 juin 2018
Interdit aux moins de 12 ans lors de sa sortie en France
Distribution
Benicio del Toro : Alejandro Gillick
Josh Brolin (VF : Philippe Vincent) : Matt Graver
Isabela Moner: Isabela Reyes
Jeffrey Donovan : Steve Forsing
Manuel Garcia-Ruflo: Gallo
Catherine Keener : Cynthia Foards
Matthew Modine: James Ridley
David Castaneda: Hector
Elijah Rodriguez : Miguel Hernandez
Ian Bohen : Carson Wills
Jake Picking : Shawn
Jackamoe Buzzell : commandant Willett
Shea Whigham : Andy Wheeldon
Christopher Heyerdahl : le directeur
Howard Ferguson Jr. : Troy
Jacqueline Torres : Blandina
Raoul Max Trujillo: Rafael
Bruno Bichir : Angel
Jake Picking : Shawn
Diane Villegas : Ida