Chut, plus de bruit comme le dit la chanson. La famille Abbott se terre au cœur de la campagne, entourée de créatures aveugles, mais douées d’une bonne ouïe. Le plus jeune est mort en brisant le silence. Il ne reste de lui qu’une stèle sur le pont pour se souvenir. Retranché dans leur ferme au cœur des champs de maïs frémissants, ils font silence. Évelyne, la mère, attend un heureux événement, une nouvelle vie pour une humanité qui ne veut pas mourir. Regan, sa fille sourde, redouble d’attention pour ne pas briser le silence qui l’enveloppe comme un cercle protecteur. C’est aussi sa plus grande faiblesse. Il faudra éviter de hurler à la naissance du nouveau membre. En attendant, les sorties se font à pas de velours. C’est une vie de tombeau pour l’éternité qui s’annonce. Lorsque le son se propage, il déchaine la fureur des créatures venues de l’espace. Se taire pour ne pas mourir est la nouvelle devise des survivants de l’humanité.
Prévu au départ pour un sequel de la saga inégale de Cloverfield, les scénaristes John Beck et Bryan Woods préfèrent construire un nouvel univers. Le pitch est assez basique. En 2021, des créatures aveugles envahissent la terre, réagissant au moindre bruit, ce qui cause votre mort. Il faut captiver l’attention du spectateur pendant plus d’une heure trente sur cette idée simple. John Krasinski réussit à merveille en jouant avec nos nerfs et le silence s’installant sur l’écran et dans la salle. Il donne vie à un univers réaliste. Les pieds sont entourés de chiffon, la lumière sert d’avertisseur et d’arme contre les créatures nocturnes.
Il part de l’espace extérieur pour finir par une belle séquence roublarde en huis-clos. Tout repose sur les acteurs avec une mention spéciale pour la jeune sourde, Millicent Simmonds. Ne pas entendre n’est pas forcément un atout face aux monstres de l’extérieur. Elle possède ses propres faiblesses et ses forces cachées qui se dévoileront face à la menace. C’est le personnage qui évolue le plus dans ce monde où rester sur place est la meilleure des solutions. Il s’installe un climat proche du film d’épouvante, jouant sur l’indicible et l’invisible. Dans la lignée d’Alien et du dernier Jurassic Park, il fait l’économie des monstres, jouant plus sur notre imaginaire et l’invisible. Il centre son action sur une famille isolée et la paranoïa qui peu à peu envahit l’écran.
C’est une partie d’échecs silencieuse, uniquement troublée par le bruit qui éclate dans ce silence. C’est avec habilité qu’il utilise toutes les possibilités que lui offre sa thématique. Il est à parier que Sans un bruit deviendra rapidement un film culte. Dans les ténèbres, c’est le silence des galaxies et du monde qui nous conduit à la lumière. C’est notre capacité à nous replier sur notre être intérieur qui nous transporte au cœur du monde et nous sauve du mal. Il serait intéressant que la suite s’attache à la confrontation de l’humanité à ses démons. En attendant, pour un premier pas, c’est prenant et agréable de voir une salle silencieuse !
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : A Quiet Place
Titre français : Sans un bruit
Titre québécois : Un endroit silencieux
Réalisation : John Krasinski
Scénario : Scott Beck, John Krasinski et Bryan Woods
Direction artistique : Sebastian Schroder
Décors : Jeffrey Beecroft
Photographie : Charlotte Bruus Christensen
Montage : Christopher Tellefsen
Musique : Marco Beltrami
Production : Michael Bay, Andrew Form et Bradley Fuller ; John Krasinski (coproducteur)
Sociétés de production : Platinum Dunes ; Sunday Night (coproduction)
Société de distribution : Paramount Pictures (États-Unis, France)
Budget : 17 millions de dollars
Pays d'origine : États-Unis
Langue originale : anglais, langue des signes américaine
Format : couleur
Genre : horreur
Durée : 90 minutes
Dates de sortie : 20 juin 2018 Interdit aux moins de 12 ans
Distribution
John Krasinski (VF : Stéphane Pouplard) : Lee Abbott
Emily Blunt (VF : Laëtitia Lefebvre) : Evelyn Abbott
Noah Jupe (VF : Timothé Vom Dorp): Marcus Abbott
Millicent Simmonds : Regan Abbott
Cade Woodward : Beau Abbott