En 2045, à force de jouer avec la petite planète bleue, le monde agonise, respire mal et les pauvres gens se retrouvent dans des bidonvilles. Les nantis se la coulent douce dans leurs appartements-terrasses pendant que le reste de la planète vie entassée sur des mobil-homes. L’horizon est une pile hétéroclite de sculptures d’un petit dieu malin et farceur. Il ne reste que le monde du roi James Halliday, super-geek nourri à la culture pop des années quatre-vingt. Un casque et une combinaison faite de bric et de broc, les vieux gants de la tatie et quelques soudures suffisent à trouver la route du bonheur. Le joueur est transporté dans un autre monde, devenant un autre avatar déconnecté de l’irl (la vie réelle).
Wade devient Parzival (Perceval), Samantha, Art3mis, Helen, Aech. Petit groupe indépendant sans clan, ils laissent le vent virtuel conduire leur course. Avec la mort roi James Halliday, l’Oasis est en deuil, mais le dieu pense à tout et laisse un Graal au sein de la matrice. Trois clefs et différentes énigmes conduiront le chevalier de cette nouvelle table ronde à devenir le maitre, non pas du château du roi pêcheur, mais de l’Oasis. Parzival se lance dans la quête, le cœur noble, quittant sa forêt de mobil-homes pour le cœur de l’Oasis. Il comprend très vite, avec la mort de sa tatie et la destruction de son foyer, que le jeu prend une autre tournure. C’est toujours l’argent contre l’humain, Sorrento et son entreprise diabolique IO souhaitent récupérer l’Oasis pour l’inonder de pub. Il ne suffit peut-être pas d’une armée pour vaincre, mais d’un peu d’intelligence et de pas mal de débrouille.
Après une série de films historiques interrogeant notre le monde sur son avenir à travers son passé, Lincoln, le Pont des espions, Pentagon Papers, le malicieux Steven Spielberg de ET, revient au monde de son enfance. Dans l’Oasis, les courses s’effectuent à bord de la DeLorean de Retour vers le futur, on écoute du Van Halen, on danse sur Saturday Night Fever, on cite les films de John Hughes et bien d’autres choses des années geek. On croise Godzilla, le géant de fer, le T Rex de Jurassic Park, King Kong et bien d’autres choses. Vos parents vous affublent d’un nom de super héros pour faire plus cool. Le roi Spielberg nous entraine dans un univers visuel foisonnant, aux références nombreuses, où le meilleur des geeks pourrait se perdre. Les références cinématographiques se mélangent à celles des jeux pour un retour vers le passé ancré dans cet avenir qu’est l’Oasis. Spielberg évite la carte de la nostalgie pleurnicharde pour en faire autre chose.
Il joue de la couleur dans ce monde virevoltant qui finit par nous noyer dans une valse à mille temps. Couleurs de l’Oasis et des armures de nos héros face au noir des équipes d’IO. Derrière, se cache la lutte du monde des nantis et des pauvres bougres parqués dans des bidonvilles. On regrette qu’à l’instar de Soleil vert, il ne développe pas plus cet aspect important. Il nous livre un bel hommage à Kubrick et Shining en détournant certaines scènes et l’hôtel dans un moment crucial de la quête. La dernière épreuve nous ramène aux origines du monde des geeks, avec le saint Graal des consoles de jeu. Spielberg évite les références à son œuvre, pourtant pilier de cette génération biberonnée aux blockbusters qu’il invente avec Les dents de la mer.
Il est plus malin et c’est à travers deux figures qu’il se dévoile, Watt, son double en quête d’autre chose qu’un simple plaisir de joueur. L’autre figure, c’est celle de James Halliday le créateur de fictions infinies. Comme d’habitude, il faut regarder derrière les apparences pour découvrir, au-delà du happy end naïf, qu’être un hard gamer, un no life, ce n’est pas bien. Il cache un autre sens que l’on peut décrypter avec les paroles de James Halliday « J’ai créé l’Oasis parce que je ne me sentais pas bien dans le monde réel. Je n’arrivais pas à communiquer avec les autres. » C’est un peu ce qui a conduit le jeune Spielberg à faire du cinéma. La clé est peut-être, une des dernières images du film, un petit garçon devant sa télévision dans une chambre où règnent les derniers héros de carton. C’est toujours l’enfance qui guide le jeune adulte et le vieillard vers le dernier silence.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original et français : Ready Player One
Titre québécois : Player One
Réalisateur : Steven Spielberg
Scénario : Ernest Cline et Zak Penn, d'après Player One d'Ernest Cline
Direction artistique : Mark Scruton
Décors : Adam Stockhausen
Costumes : Kasia Walicka-Maimone
Photographie : Janusz Kaminski
Montage : Michael Kahn
Musique : Alan Silvestri
Production : Steven Spielberg, Donald De Line, Dan Farah et Kristie Macosko Krieger ; Adam Somner (associé)
Sociétés de production : Amblin Partners, Amblin Entertainment, De Line Pictures, Farah Films & Management, Reliance Entertainment, Village Roadshow Pictures et Warner Bros.
Société de distribution : Warner Bros.
Budget : 175 millions de dollars (source internet)
Pays d’origine : États-Unis
Langue originale : anglais
Format : couleur
Genre : science-fiction
Durée : 140 minutes
Dates de sortie1 : 28 mars 2018
Distribution
Tye Sheridan (VF : Gabriel Bismuth-Bienaimé) : Wade Owen Watts / Parzival
Olivia Cooke (VF : Léopoldine Serre) : Samantha Evelyn Cook / Art3mis
Ben Mendelsohn (VF : Philippe Crubézy) : Nolan Sorrento
T. J. Miller (VF : Marc Arnaud) : i-R0k
Simon Pegg (VF : Xavier Fagnon) : Ogden Morrow
Mark Rylance (VF : Gabriel Le Doze) : James Donovan Halliday / Anorak
Lena Waithe (VF : Astrid Bayiha) : Aech
Win Morisaki : Toshiro/Daito
Philip Zhao : Xo/Sho
Hannah John-Kamen (VF : Marie Tirmont) : F'Nale Zandor
Susan Lynch (VF : Claire Beaudoin) : Tante Alice
Ralph Ineson : Rick
Simone Kirby : Loretta
Letitia Wright : Reb
Mckenna Grace : une écolière