Une jeune femme de vingt-et-un ans accouche sous X. Elle n’a pas d’animosité, pas de souci particulier, elle n’est juste pas prête. Cet enfant, elle se sent incapable de l’aimer. Elle veut cependant le meilleur pour ce bébé qui ne sera jamais le sien. Le meilleur, c’est-à-dire des parents adoptifs qui puissent être là pour lui, se soucier de lui et lui donner de l’amour, ce dont elle se sent incapable à ce moment de sa vie, dans les circonstances présentes.
Dès le démarrage, on comprend que la beauté des décors ne va pas être l’argument central du film. Nous voilà dans un bureau des services sociaux en charge de l’adoption. Gros plans, visages (presque) sans maquillage. Du brut. Alice se voit annoncer que son dossier est probablement retenu. Flashback, nous découvrons que ça fait huit ans qu’elle est sur les rangs. Pas de commentaire. Le spectateur peut très bien se forger son opinion.
De séquence en séquence, nous remontons la chaîne qui conduit de l’accouchement sous X au recueil du bébé jusqu’à son arrivée dans sa famille adoptive – monoparentale comme la loi le permet depuis peu.
Jeanne Herry brosse un portrait des coulisses de ce pseudo conte de fées. Elle montre bien les doutes, le travail subjectif et prenant des différents intervenants : les sages-femmes et infirmières, l’assistante sociale, les assistants familiaux, les éducateurs de la petite enfance. Elle nous fait comprendre que l’adoption n’est pas un caprice pour bobos bien-pensants mais un long cheminement jalonné de doutes et d’angoisse mais aussi de joie et d’émotion.
Elle réussit à ne pas repeindre le tout en rose bonbon. Le choix des acteurs est judicieux. Ils ont tous cette qualité initiée par Vincent Lindon dans ses films les plus récents, être dans le non-jeu. Et cela marche très bien. On peut regretter la scène de trop où Sandrine Kiberlain s’épanche auprès de Gilles Lellouche mais bon… Ce dernier en mec bourru avec un cœur gros comme ça prouve une fois encore qu’il a des possibilités très larges.
Pupille se regarde comme la chronique contemporaine d’une société qui essaie de tenir debout. Le travail social y (re)trouve ses lettres de noblesse, sans être pour autant porté aux nues. C’est un atout formidable de civilisation et on sent que la réalisatrice souhaite le mettre en avant à l’heure où il est remis en cause de toutes parts pour des raisons économiques.
Ce n’est pas faire preuve de naïveté ou d’angélisme que de présenter au public une histoire qui les mettra devant une question qu’il n’avait pas ou peu approfondie. Oui le cinéma est aussi un outil de réflexion.
Françoise Poul
Titre : Pupille
Réalisation : Jeanne Herry
Scénario : Jeanne Herry
Photographie : Sofian El Fani
Montage : Françis Vesin
Musique : Pascal Sangla
Décors : Fabienne Guillot
Costumes : Marine Demoury et Anna Lalay
Producteur : Alain Attal, Vincent Mazel et Hugo Sélignac
Producteur associé : Philippe Logie
Coproducteur : Patrick Quinet
Producteur délégué : Solveig Rawas
Production : CHI-FOU-MI Productions et Les Productions du Trésor
Coproduction : Studio Canal, France 3 Cinéma et Artémis Productions
Distribution : Studio Canal
Pays d'origine : France
Genre : Drame
Durée : 107 minutes
Dates de sortie : 5 décembre 2018 (en salles)
Distribution
Sandrine Kiberlain : Karine
Gilles Lellouche : Jean
Élodie Bouchez : Alice
Olivia Côte : Lydie
Clotilde Mollet : Mathilde
Jean-François Stévenin
Bruno Podalydès : l'ex d'Alice
Miou-Miou : Irène
Leïla Muse : Clara
Stéfi Celma : l'auxiliaire Élodie
Anne Suarez : Laure
Amaury de Crayencour : l'acteur
Serge Kribus : l’acteur qui joue Louka
Youssef Hajdi : Ahmed
Yannick Choirat : Stéphane
Julie Debazac : le responsable du service de maternité
Émilie Gavois-Kahn : la puéricultrice
Anne Kessler : l'éducatrice du service d'adoption
Nicolas Bridet : Fabien
Grégory Gadebois : le chef du service PFS
Thibault Vinçon : l'homme candidat pour l’adoption
Alain Lenglet : Rémy
Florence Muller : la mère de Clara
Benoit Carré : le pédiatre PFPE