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affiche Métamorphoses

Métamorphoses

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Un film de Christophe Honoré,
Avec Amira Akili, Sébastien Hirel, Mélodie Richard,

Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h42
France

En Bref

On avait flairé le goût de Christophe Honoré pour raconter des contes. C’était une transition dans Non, ma fille tu n’iras pas danser, qui mettait en scène un court conte traditionnel breton. Là le réalisateur nous offre une adaptation durée long-métrage des Métamorphoses d’Ovide avec une succession de contes mythologiques.

Honoré a dans ses adaptions l’intelligence et le talent de les replacer dans le contexte contemporain. Et c’est ainsi qu’après La Belle Personne, libre adaptation de La Princesse de Clèves qui se déroulait à Paris, il place cette intrigue dans une banlieue du sud de la France. Une fille, Europe, tombe amoureuse d’un bel et jeune garçon qui se prétend être Jupiter, le Dieu des Dieux. C’est alors le début d’une longue aventure ponctuée par des rencontres divines divisant le film en trois parties : la première comptant celle de la jeune fille avec Jupiter, la seconde avec Bacchus et la dernière avec Orphée.


Le doux vent de cette œuvre met un peu de temps à nous transporter. Après un prologue (racontant le triste mythe d’Actéon faisant face au corps nu et la rousseur de Diane) plantant le décor et 20 premières minutes relativement déconcertantes, l’interrogation est de mise. Le sentiment d’être dépassé se fait sentir et l’œuvre peut paraître trop élitiste. De ce camion conduit à l’aveugle, à Jupiter qui change son amour d’un soir en génisse... Mais la magie des Dieux finit par opérer relativement rapidement et on se laisse bercer dans le film avec la douceur de la caméra filmant ses acteurs.

Les acteurs sont des inconnus non-professionnels. Habitués à sa troupe avec les Mastrionni, Garrel et Sagnier mais réputé également pour avoir lancé plusieurs acteurs aujourd’hui reconnu, le réalisateur change ici de cycle. C’est un renouveau au niveau des acteurs comme dans le cinéma d’Honoré, lui qui sait et n’a pas peur de se réinventer. La justesse du choix d’acteurs est claire. Car derrière toutes ces fesses et sexes, de jeunes personnes se cachent encore naïves et en métamorphose. Ce titre et ses métamorphoses d’hommes en animaux, c’est ainsi donc également la métamorphose du corps humain. Et le résultat d’ensemble du jeu d’acteurs est bon, certains personnages s’imposant plus que d’autres tels Bacchus (Damien Chapelle) ou Junon (Mélodie Richard).

Ces acteurs se retrouvent projetés sur le devant de la scène dans ce film difficile à interpréter. On songe à plusieurs reprises à d’autres types arts, de la peinture dans le prologue quand les paysages se figent, au théâtre et la poésie dans l’élocution et les dialogues à des passages presque « chorégraphiés ». Honoré garde le côté littéraire de l’adaptation avec ces phrases des Métamorphoses que l’on retrouve au début et à la fin du film, se répondant. L’image est belle et la nature forestière sert de décor, où la lumière jaillit sur ces jeunes corps caressés par la caméra avec sensualité et amour.

Le placement dans le monde moderne renforce l’intérêt envers les Dieux et la mythologie. Alors que cette banlieue avait tout pour amener le film vers un drame social, une touche de fantastique et de surréalisme est de mise. Cela créé un décalage qui rend la chose magique. C’est intéressant également d’un point du point de vue de la culture, le film renseignant des mythes souvent connus mais encore utiles aujourd’hui. Cela par exemple pour l’origine du terme hermaphrodite ou encore narcissique. Très bien écrit les dialogues sont vrais malgré les grandes phrases des Dieux et les mythes s’enchainent sans accrocs et avec une certaine logique. Comme une histoire comptée à cette jeune Europe, spectatrice de ce monde surréaliste.

Et finalement si Europe, de par son choix final notamment, n’est pas la déesse représentative de notre continent ? Encore jeune et naïve et qui s’appuie sur une forte culture grecque et divine, elle est pourtant d’origine méditerranéenne. La beauté du multiculturalisme dans un choix politique apparent.

Une interrogation subsiste même : est-ce ces mythes qui sont racontés avec comme point de départ la rencontre amoureuse entre deux êtres ou bien tout simplement l’imagination et l’utopie de la jeunesse et de l’amour se prenant pour des Dieux ? Car au final, au-delà de la touche divines, ce sont des choses « du quotidien », Jupiter trompe Junon sa copine puis la dissimule ou encore ces meurtres et disparitions. Cela est également la fugue de l’amour, des adolescents invincibles et portés par une force divine.

Honoré creuse dans la possibilité créative du cinéma et lâche un OVNI, une œuvre intelligente et maitrisée, la métamorphose fleurit dans notre esprit et nous touche. Palme d’or de l’anticonformisme et sommet de l’audace, du cinéma changeant du naturalisme dominant, du cinéma !

Clément SIMON

Note du support :
5
Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 2.35, Format DVD-9
Langues Audio : Français Dolby Digital 5.1, 2.0
Sous-titres : aucun
Edition : Sophie Dulac Vidéo

Bonus

Rushes du film commentés par Christophe Honoré

Entretien avec Catherine Clément, philosophe et écrivain

Titre français : Métamorphoses

    Réalisation : Christophe Honoré

    Scénario : Christophe Honoré d'après les Métamorphoses d'Ovide

    Photographie : Andre Chemetoff

    Pays d'origine : France

Distribution

    George Babluani

    Mélodie Richard

    Sébastien Hirel

    Amira Akili

    Damien Chapelle