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affiche Men, Women & Children

Men, Women & Children

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Un film de Jason Reitman ,
Avec Ansel Elgort, Adam Sandler, Jennifer Garner ,

Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h59
États-Unis

En Bref

Un ado sportif en phase dépressive tombant dans les jeux vidéo, un couple ne se désirant plus tombant dans l’adultère, ou encore une adolescente anorexique tombant dans les bras d’un homme à femmes, et on en passe... Tout cela dans un même film, ça ferait trop ?

Jason Reitman ose pourtant et tente de nous refaire un film générationnel ancré dans la société actuelle. Mais là où la mayonnaise avait pris en 2007 faisant de Juno un classique du cinéma indépendant américain des années 2000, ce film choral se perd dans une tentative d’analyse de l’impact des nouvelles technologies sur notre génération.


Le postulat a le mérite d’intéresser : quelle est l’influence des nouvelles technologies et réseaux sociaux sur les enfants de cette génération, appelée pour certains la « génération Facebook » ? Le recul nécessaire à une telle analyse commence à apparaître aujourd’hui et l’audace de faire un film dépeignant cela était bien présent. Pas ici de film d’anticipation, sur l’impact potentiel, mais une tentative de film d’analyse sociétale.

Malheureusement dans le choix même des personnages, le film semble ne pouvoir décoller. Les protagonistes ne sont absolument pas ancrés dans la société, ou alors celle américaine et on ne le savait pas. Ce ne sont qu’un lot d’idées reçues et clichés sur ce que pourrait être l’adolescence face aux nouvelles technologies. Certes l’adolescent qui est en nous ou l’adulte avec le couple peut retrouver ici certaines lointaines ressemblances ou fantasmes. A vouloir ratisser trop loin, l’ambition du réalisateur américain était surement trop grande et tout est vu de l’extérieur. La diégèse du film se fait par des hasards qu’on se surprend à encore voir aujourd’hui, tout comme la renaissance des films chorals au passage. Du fils qui s’aperçoit sur Facebook que sa mère se remarie, une minute avant qu’elle ne le bloque, à des conversations pornographiques sans queue ni tête entre deux jeunes, en passant par des parents castrateurs les privant d’internet à ceux frustrés les forçant à réussir dans la mode ou le sport, là où ils ont échoués. Ce sont des situations plausibles. De là à toutes les réunir dans un même lycée, un même cercle, un même film... Au final à force de prendre des cas extrêmes basculant dans le malheur à mi-film pour aboutir à un happy end, le dilemme est débusqué rapidement, cachant une moralité énorme.

Est-ce parce que c’est l’année des voyages spatiaux entre Gravity et Interstellar ? Surement que non, pourtant l’œuvre pour accentuer la volonté de brosser un large portrait d’une partie de l’humanité contemporaine, débute par des images de la sonde Voyager en 1977 tout juste lancée. Suivra cette fameuse photo treize ans plus tard, ce point bleu pâle. C’est la Terre prise en photo par le satellite à des milliards de kilomètres lorsqu’il se retourna avant de quitter le système solaire. L’idée est d’associer à la photo du satellite le livre éponyme de Carl Sagan, illustrant le devoir de l’Homme d’avoir  plus d’humilité, à renforcer ce sentiment que nous ne sommes rien dans ce monde. Un des points peut-être positif, ce partie pris pour un retour aux sources et ne pas oublier l’origine de tout cela, à travers une idée plutôt originale.

Flotte au milieu de cet amas de personnages et cette vision lunaire au destin croisé l’ambiance du cinéma indépendant américain, de la banlieue au lycée. Elle est néanmoins flouée par une musique d’ambiance, superposée par moments uniquement à une lecture de texto. Le spectateur ne peut être qu’hermétique à cela alors même qu’un Juno amenait de l’empathie.

De cette ambiance ressort une chose quand même, c’est une réflexion sur le passage de générations. Oui, Reitman a déjà sondé la précédente avec Juno, il saisit quelques différences. Le mari du couple infidèle, joué par Adam Sandler, parle alors de passage de flambeau avec son fils. Encore une fois cela est étiolé par la façon dont cela est amené : le père se rend compte qu’il est comme son fils accro aux films pornographiques. Les réflexions sont lancées sous forme de grandes phrases inabouties, libérées comme un satellite, du genre « on était différent à leur âge » ou « on a vieilli », laissant un goût amer sur la langue.

Le sujet, voir l’affiche, pouvait promettre une œuvre, poussant à une réflexion sur notre quotidien. Comme Her dans un autre registre l’avait amené cette année sur le devenir des nouvelles technologies si l’on ne se protégeait pas. Ou American Beauty il y a quelques années dressant un cinglant portrait réaliste d’une société américaine en proie aux doutes. Ici rien de tout ça, au mieux quelques instants de comédies se laissant regarder. Défendre Jason Reitman n’est ici pas une tâche aisée tant on peine à dégager quelque chose de ce Men, Women and Children.

Clément SIMON

Note du support : n/a
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