Amir, expulsé de France, retourne auprès de son père et sa sœur en Iran. Il végète, ne sachant trop que faire dans un pays qu’il a fui. Par solidarité, il aide son paternel à cacher des corps congelés découverts dans l’entrepôt de viande qu’il garde. C’est ainsi qu’il fait la connaissance du patron de son père, Motevalli. Ce dernier l’entraine dans un trafic de devises américaines, la bonne aubaine dans un pays sous embargo. Amir s’implique de plus en plus dans les magouilles de son patron. Il finit par devenir indispensable et complice, marchant sur la corde raide. Il comprend que tout ceci n’est qu’un piège qui se referme comme une nasse. Il n’y aura bientôt plus de porte de sortie et la chute pourrait le conduire en enfer. En parallèle, la famille des morts apparaît et cherche avec insistance la vérité. Amir s’aperçoit que Motevalli ne dit pas toute la vérité. La culpabilité ronge de plus en plus le jeune homme et son père. Il faudra bien faire pénitence et dénoncer le mensonge pour retrouver la paix de l’âme.
Le cinéma iranien se divise entre les réalisateurs reconnus par le système comme Abbas Amini et, dans une certaine mesure, Asghar Farhadi, et ceux en marge, clandestins de l’art comme Jafar Panahi. Le plus emblématique de la Nouvelle Vague iranienne reste Abbas Kiarostami. Le gouvernement en place juge ses films « insuffisamment islamiques », sa grande renommée internationale le protégeant en grande partie. Marché Noir s’inscrit dans le renouveau de celui-ci, après les thèmes de l’amour et les femmes interdits par l’Etat. Il laisse la place à un cinéma plus social. Derrière le film noir se cache un regard sur la société iranienne qui peut se lire de plusieurs façons.
Amir ne trouve sa place nulle part dans son pays. Certes il commet des actes répréhensibles, le trafic de devises, mais il finira par en sortir sous le poids de la culpabilité. Le film montre l’importance de la famille comme un point d’ancrage qui permet au jeune homme de se relever. Le trafic de devises peut se lire de façon positive sous un embargo provoquant la misère. Chacun s’en sort comme il peut face à cette perfide Amérique. Un autre regard nous montre une misère de l’intérieur. Il est impossible de vivre libre sous le poids de l’Etat. Le père d’Amir survit comme il peut à la mort de sa femme. Il doit se contenter d’un boulot de gardien et d’une famille à charge. Sa fille n’a pas pu se marier par manque de finance.
Amir n’a pas trouvé l’Eden en France, son salaire lui permettait de survivre sans pouvoir aider ses proches restés au pays. Il n’y a que l’enfer en occident semble nous dire le film. Pour faire fortune, il ne reste que la voie illégale et le trafic en tout genre. Derrière ses allures de polar Marché Noir comme La loi de Téhéran, cachent une analyse de la société iranienne entre vérité et propagande. Dans cette nouvelle vague hyperréaliste, le cinéma iranien peut faire figure de précurseur dans sa volonté de montrer la société à visage découvert.
Patrick Van Langhenhoven
Titre : Marché Noir
Titre original : Koshtargah
Réalisation : Abbas Amini
Scénario : Abbas Amini et Hossein Farokhzadeh
Musique : Mehran Ghaedipour
Décors et costumes : Atoosa Ghalamfarsaie
Photographie : Ehsan Rafii Jam
Montage : Hamid Najafirad
Producteur : Javad Noruzbegi et Ali Toulouei
Producteur délégué : Saeed Safarpour
Sociétés de production : A Single Man
Société de distribution : Ad Vitam
Pays de production : Iran
Langue originale : persan et arabe
Format : couleur — 2,35:1
Genre : Drame policier
Durée : 102 minutes
Dates de sortie : 26 mai 2021 (Reims) 5 janvier 2022
Distribution
Amirhosein Fathi : Amir
Mani Haghighi : Motevalli
Baran Kosari : Asra
Hassan Pourshirazi : Abed
Hamed Alipour : Hamed
Sepideh Mazaheri : Monir
Vahid Nafar : Bajenagh
Shaker Mousavi : le frère de Hashem