Ma Loute

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Un film de Bruno Dumont,
Avec Fabrice Luchini, Juliette Binoche, Valeria Bruni Tedeschi,

Genre : Comédie dramatique
Durée : 2h02
France

En Bref

Nous sommes en 1910 dans le nord de la France. La famille bourgeoise Van Peteghem menée par André (Fabrice Luchini) retrouve sa somptueuse villa de vacances surplombant la baie de Slack, non sans une certaine exaltation. Peu de temps après leur arrivée, leur joie de retrouver les plaisirs simples de la campagne se trouve entachée par de mystérieuses disparitions. Heureusement, l'Inspecteur Machin (Didier Despres) et son acolyte Malfoy (Cyril Rigaux) sont sur l'affaire et, entre deux chutes dans le sable, comptent résoudre ce mystère en interrogeant les habitants du coin.

Ils entrent en contact avec la famille Brufort, dont le fils aîné répondant au doux prénom de Ma Loute (Brandon Lavieville) voue une passion mordante pour Billie (Raph), la fille aînée de la riche famille...

Un an après la série P'tit Quinquin, Bruno Dumont poursuit son portrait loufoque mais souvent drôle du nord de la France.

Ma Loute que l'on pourrait qualifier de vaudeville en costume refuse tout mystère mais offre au spectateur une expérience à la fois fascinante et irritante. S'il est parfois difficile d'expliquer sa cohérence, le dernier long-métrage de Bruno Dumont, présenté à Cannes en compétition officielle révèle avant tout d’une liberté artistique.

Dans le paysage cinématographique francophone, Bruno Dumont détonne, dérange, agace autant qu'il force l'admiration. S’il était habitué au drame, il s'essaye depuis le succès de sa série sur Arte à la comédie burlesque avec tout autant de succès.

Ma Loute s'inscrit donc dans la lignée de P'tit Quinquin. Presque un peu trop proche dans ses intentions, l'intrigue, emmenée tant par des stars du cinéma que par d'illustres inconnus, parvient tout de même à nous plonger au cœur de ses parc à huitres et de ses plages presque désertes dont Dumont sait nous montrer la beauté.

Toujours dans l'exagération, les personnages sont attachants tout aussi que dégoûtants : que ce soit cette famille bourgeoise dégénérescente ou nos charmants autochtones amateurs de viande fraîche, tous semblent empêtrés dans une sorte de tragique destin auquel ils tentent d'échapper.

Aude (Juliette Binoche) cherche, entre deux exaltations, son salut dans la religion, Billie se déguise pour brouiller les pistes ; quant à Ma Loute, il fuit sa famille en flirtant avec la jeune fille, jusqu'à oublier sa nature profonde, qu'un grognement finira par lui rappeler.

Bruno Dumont ne nous épargne rien de ce spectacle, les dialogues sont étirés à outrance, le ridicule des personnages assumé, si bien que l'on ne sait parfois plus où nous entraîne le récit.

Embourbé dans la mélasse, le spectateur subit quelque peu la lenteur du film qui ne tient que par la mélodie de ses accents du Nord et par cette idylle naissante dont on craint le pire...

Le genre (s'il en est un), pèse malheureusement un peu trop sur la narration et ce qui fonctionnait avec le format court sériel du P'tit Quinquin peine ici à trouver son équilibre et cette lutte des classes d'un nouveau genre finit par ennuyer quelque peu.

Finalement que nous reste-t-il de cette curieuse expérience une fois les lumières rallumées ? Un film attachant qui rappelle à nos bons souvenirs le cinéma de Jacques Tati ou quelques sketches Des Deschiens, une impression foutraque, un joyeux bordel organisé qui a pourtant le mérite de poser des questions sur les apparences et l'identité sexuelle sous un jour nouveau, bien loin de nos comédies françaises bien-pensantes.

Ma Loute, ne nous épargne rien, c'est un ovni compliqué à juger, comme ses personnages et c'est ce qui fait son évidente force.

Certains s'agaceront de sa cruauté, d'autres s'en amuseront... pour se faire une idée, ne reste qu'à plonger vous aussi, dans les eaux froides du nord.

Sarah Lehu