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affiche Les premiers, les derniers

Les premiers, les derniers

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Un film de Bouli Lanners ,
Avec Albert Dupontel, , Bouli Lanners, Suzanne Clément,

Genre : Drame psychologique
Durée : 1h38
Belgique

En Bref

« Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux! »

 L’errance, la longue marche vers nulle part, finit par aboutir au fin fond du monde alors que celui-ci semble pousser son dernier souffle. Gilou et Cochise portent la mort, tueurs à gages en quête d’un téléphone volé au contenu sensible. Esther et Willy pensent que la fin des temps est proche. Handicapé, simple d’esprit, peut-être pas tant que cela. Ils partent en quête de la fille volée d’Esther. Une bande de chasseurs malades, prêts à imposer leur loi, faire le coup de feu sur n’importe quoi, s’invite dans le récit.

Un cerf traverse la campagne, symbole de mort et de renaissance, parcourant ce voyage vers l’inconnu. Deux vieux prennent leur temps pour finir la dernière course des vivants avant l’ultime tombeau. Une jeune femme, et l’amour dans ce néant danse dans le cœur de Cochise. Jésus, protecteur des innocents, apparaît comme par miracle quand le vent tourne mauvais. Le monde arrive devant une porte en bout de piste. Il nous appartient de la pousser et demain sera un autre jour. Autour, la morne plaine et les nuages d’acier pleurent une fin qui ne viendra peut-être jamais. « Vivre ce n’est pas juste respirer » c’est un peu la métaphore, la phrase clef de ce récit.


 « Voici ce qu’a dit le premier et le dernier j’étais mort et je suis revenu à la vie. »

Bouli Lanners aime l’errance et la famille, comme un chant éternellement recommencé à travers ses réalisations. Elle se retrouve au cœur de ce film où chacun semble guidé par une force invisible, le divin, le destin, le vent qui caresse la joue du voyageur. Allez savoir quand la poésie s’en mêle. Elle ne cherche pas les chemins de la compréhension, mais celui de l’âme. Lanners aime le western, celui de John Ford au long paysage s’étirant sur le même format que Les premiers et les derniers, le scope. C’est aussi  celui de Sergio Leone aux gueules marquées par la piste, serré sur les faces de brutes, de femmes, de bons ou de truands. Le paysage n’est pas qu’un décor, c’est la toile où s’étirent les existences. Elles se fracassent contre lui, saignent, vivent, aiment et meurent. Elles trimbalent leur petit trésor, leurs incertitudes ou leur raison d’avancer, de tenir bon, leur rêve entre les mains. Il représente un no man's land, un lieu improbable où le monde semble pousser son dernier souffle.

Jésus peut revenir pour guider les hommes vers l’horizon nouveau sans que personne ne s’en étonne. C’est le début et la fin ou l’inverse, qu’importe, une séquence s’achève pour qu’une autre vienne. C’est la course de deux enfants perdus qui cherchent la vie, faibles d’esprit, mais le cœur rempli de cette virginité retrouvée pour donner de nouvelles couleurs à l’aube. Ils sont la promesse que nous avons étouffée. Gilou et Cochise c’est la face sombre, la mort qui finit par tout lâcher lui préférant la vie. On enterre une momie, on ramène une vivante. Ce monde de gris, de noir accouche d’un horizon azur.

C’est la famille éclatée, comme chaque fois dans le cinéma de Bouli Lanners, en manque, en quête de son unité qu’elle finit par retrouver d’une façon ou d’une autre. Mort et vie, renaissance se joignent à la partie nous rappelant combien les petits corps frêles que nous sommes sont éphémères. Le portable n’est que le prétexte à une balade qui prend des chemins de traverse et fouille l’âme des personnages. Chacun en ressort avec une nouvelle vision du monde, plus optimiste, meilleur. Comme si toute cette route où trône l’innocence de ces deux esprits simples ne servait qu’à comprendre le sens de notre nature profonde. Ce besoin d’amour  éclate en fin de récit et inonde les cœurs. C’est l’innocence qui perce le cœur des mécréants et leur rappelle la vraie nature de l’existence.

Il ne manque aucune figure, pas même celle de la maison perdue dans la plaine où une femme tente de survivre, de bâtir son Eldorado. Le réalisateur a su choisir ses acteurs des deux gamins magnifiques tout en sobriété, dans un jeu intérieur qui remplit ce paysage vide. David Murgia et Aurore Broutin sont magnifiques, cette dernière est à suivre de près. Elle n’hésite pas à se mettre ne danger, à choisir des rôles peu faciles qui la grandissent chaque fois un peu plus. Dans le duo des chasseurs de primes, Bouli Lanners et Dupontel nous rappellent les Gary Cooper, James Stewart, Scott Glenn, John Wayne, Henri Fonda de la grande époque, ces taiseux qui balançaient la parole juste.

Philippe Rebbot nous prouve dans le rôle de Jésus combien son talent est immense et souvent mal employé. Michael Lonsdale dans le rôle de l’aubergiste et Max Von Sydow en croquemort prêcheur aux allures du prêtre de L’exorciste dévoilent toute la richesse de leurs personnages bibliques. Comme le dit le réalisateur, le premier et le dernier se ressemblent, se rassemblent dans ce désir d’exister à travers un clan familial. Le cinéma belge surréaliste nous emporte une fois de plus entre poésie et réalité à examiner de près notre âme.

 Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
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Edition :


Réalisation et scénario : Bouli Lanners

    Directeur de la photographie : Jean-Paul de Zaetijd

    Décors: Paul Rouschop

    Producteur : Jacques-Henri Bronckart

    Société de production : Versus Production

    Société de distribution : Wild Bunch Distribution

    Bande originale: Pascal Humbert

    Date de sortie : 27 janvier 2016

Distribution

    Bouli Lanners1 : Gilou

    Albert Dupontel : Cochise

    Suzanne Clément

    David Murgia : Willy

    Serge Riaboukine

    Michael Lonsdale

    Max von Sydow

    Aurore Broutin : Esther

    Lionel Abelanski

    Philippe Rebbot : Jésus

    Virgile Bramly

    Mehdi Frihi