L’âme humaine possède des recoins qui ne sont pas beaux à voir. Au fond dort un vieux chien aigri et méchant que la vie en société nous empêche de lâcher. Imaginez, à bout de souffle, un ras le bol intolérable, trop de…, et vous laissez la bête sortir. Vous enlevez le cordon de sécurité et laissez s’exprimer votre vengeance, rancœur, mal au cœur, aigreur de l’âme. C’est ce que font les personnages de ces six histoires où la noirceur de notre société se dispute la part belle avec l’envie d’en rire ou d’en pleurer. Il faudra vous méfier des billets d’avion gagnants pour un pays où luxe et jouissance vous attendent.
L’atterrissage pourrait bien vous donner des sueurs froides. Vous apprendrez que le métier de critique est à haut risque, surtout quand ce dernier reflète l’âme d’un salopard. La cuisinière risque de vous faire payer ses aigreurs d’estomac. Vous réviserez vos critères sur les mariages heureux surtout quand la jeune promise apprend que sa tête s’orne d’une belle ramure. Madame n’est pas d’humeur à badiner et le jour le plus beau vire au carnage digne d’un film de La Iglesias ou d’Almodovar. Vous deviendrez peut-être l’idole des foules avec de jolies petites bombes sur les locaux de cette société chargée de percevoir les PV. A votre décharge, un PV ça va, deux PV, passe encore, mais une ribambelle, bonjour les dégâts. Si votre fils vous encombre d’un cadavre, no problem, le procureur avec un bon petit pactole est là. Il est bon d’être riche et célèbre. Damián Szifron se paye même le luxe de revisiter Duel à sa façon.
Six petites vengeances frappent à la porte de ce film pour dans la noirceur de l’âme, pour nous faire rire aux éclats. Comme dans tout film à sketchs, il existe des hauts et des bas, variant avec votre humeur et celle du spectateur. Le réalisateur aux commandes d’une série réputée en Argentine s’amuse avec les genres, Les Amants passagers d’Almodovar, son producteur pour le début. Le polar, le fantastique, la romance, tous s’étalent dans la robe de la mariée pour finir dans le cynisme le plus percutant. Dès la première parabole de méchanceté, nous comprenons que rien n’arrêtera le couteau de remuer dans la plaie. Ensuite, il file sur les rails de l’humour noir et de ce que vous avez toujours rêvé de faire sans oser le demander.
C’est en poussant au plus loin le bouchon de la vengeance qu’il prend tout son suc. Il doit beaucoup à ses acteurs. Ricardo Darin, acteur argentin maintenant reconnu, s’amuse tout autant que Damián Szifron dans ce personnage de Bombita. Traiter le film de bête et méchant n’est pas un euphémisme, dans ce monde moderne où chacun pense à soi, nos salopards se la jouent enfoirés de première. Ce qui nous remplit de sympathie, c’est bien que pour une fois, le pauvre type a l’occasion de savourer sa vengeance contre le système. Alors, nous ne pouvons qu’acquiescer aux représailles, ils l’ont bien mérité après tout !
Pour une fois le boomerang revient à l’envoyeur avec la monnaie et le solde de tout compte. Le spectateur se sent vengé à son tour de ces petits riens qui nous pourrissent la vie. Le trait trempe dans la caricature, plonge dans la mare noire de nos misères. Le tout est à consommer sans modération, et comme les jeux vidéo, ceci n’est pas la réalité, ne passez pas à l’acte ! Bien que ce soit à vous de voir où se trouve votre limite de la bienséance… À la question peut-on rire de tout, le film nous répond oui, avec intelligence et subtilité pour exploser notre société névrosée et la plonger dans un chaos d’où elle ressortira peut-être meilleure.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus:
Copie digitale offerte au format UltraViolet
Making of (15')
Bande-annonce
Titre Français : Les nouveaux sauvages
Titre original : Relatos salvajes
Titre international : Wild Tales
Réalisation : Damián Szifron
Scénario : Damián Szifron
Direction artistique : María Clara Notari
Décors : María Clara Notari
Costumes : Ruth Fischerman
Montage : Pablo Barbieri Carrera et Damián Szifrón
Musique : Gustavo Santaolalla
Photographie : Javier Julia
Son : Jose Luis Diaz
Production : Agustín Almodóvar, Pedro Almodóvar, Esther García, Matías Mosteirín et Hugo Sigman
Sociétés de production : El Deseo, Kramer and Sigman Films et Telefe
Sociétés de distribution : Warner Bros.
Pays d’origine : Argentine et Espagne
Langue : Espagnol
Durée : 155 minutes
Genre : Comédie dramatique
Distribution
Ricardo Darín : Simon Fisher
Leonardo Sbaraglia : Diego
Darío Grandinetti : Salgado
Erica Rivas : Romina
Nancy Dupláa : Victoria