Audrey, Manu, Hélène, Angélique s’occupent de l’Envol, un centre d’accueil pour femmes SDF. Elles en sont le cœur qui bat avec conviction et amour, mais cela reste insuffisant devant les chiffres pour la municipalité. La décision est prise. Adieu l’asile de bric et de broc, en route pour le centre aseptisé Anatole France. Ce poète français aurait sans doute eu honte de l’emprunt de son nom pour cet accueil à la 1984. Audrey, Manu, Hélène et Angélique décident de se battre pour que leurs protégées puissent trouver le souffle de la réparation et ne meurent pas. Elles se lancent dans un combat perdu d’avance devant une administration qui compte et n’écoute pas les cœurs livrés à la chamade du désespoir. Elles feront tout pour que ne s’achève pas une histoire ramenant l’espérance et la délivrance dans les sombres jours de l’errance. Est-ce qu’elles gagneront contre un système aveugle ou perdront-elles définitivement face à la bureaucratie sans âme ?
C’est sur une idée de Claire Lajeunie, réalisatrice et de son documentaire sur France 5, Sur la route des invisibles que nait le projet. Elle suit pendant cinq mois des femmes SDF. Elle raconte cette histoire dans un livre Sur la route des invisibles aux Editions Michalon. Nous avançons à l’aube de ce troisième millénaire, fiers de nos acquis et des technologies nouvelles. Il ne faudrait pas perdre notre humanisme. Comment une collectivité civilisée peut-elle encore se regarder sans avoir honte quand elle compte 40 % de femmes parmi les SDF et un nombre considérable d’invisibles. Ce sont ces anonymes, ces brisées de l’âme, rejetées par la société, expulsées, sur le pavé de nos villes devenant le cœur des invisibles. C’est à ce sujet, après Discount, sur l’extrême misère que s’attaque Louis-Julien Petit. Il pointe, dénonce une fois de plus, en réalisateur engagé, nos travers les plus inadmissibles.
Comment accepter qu’une partie d’entre nous ne trouve pas un asile, un port pour retrouver le chemin de la vie ? L’institution reste trop souvent aveugle et sans âme face à un problème qui demande d’autres réponses que des chiffres et des CRS au petit matin pour vider des tentes. Il dresse dans le portrait de toutes ces femmes, au fur et à mesure du récit, l’échec d’une société, d’une civilisation. Nous comprenons que la solution ne se résume pas à des structures bureaucratiques oubliant bien souvent le fond du problème. Parfois le film nous perd en cours de route à trop vouloir en faire dans le bon sens. Il évite le pathos et le larmoyant pour, avec un soupçon d’humour, pointer l’essentiel. Dans une mise en scène hyper réaliste à la Brizé proche parfois du documentaire, il nous entraine au fond de la misère au cœur de nos villes.
Il est plus que temps de trouver, d’inventer dans ce moment de grande réflexion de la société, un espace pour que ces oubliées se reconstruisent. Il explore de nombreuses figures, de la jeune fille perdue à la mamie sortie de prison en passant par des exilées sans papiers. C’est autant de cas que d’âmes en peine réclamant une attention particulière. Il n’oublie pas les responsables du centre, confrontées chaque jour à cette misère, parfois enthousiastes, parfois déprimées. C’est avec cœur et conviction que les actrices les incarnent. Il est peut-être temps que chacun d’entre nous passe aux actes. Vous l’avez compris, c’est un film que nous soutenons et défendons de tout notre cœur.
Patrick Van langhenhoven
Titre : Les Invisibles
Réalisation : Louis-Julien Petit
Scénario : Louis-Julien Petit et Marion Doussot
Adaptation et dialogue :
Photographie : David Chambille
Montage : Nathan Delannoy & Antoine Vareille
Décors : Arnaud Bouniort
Musique : Laurent Perez Del Mar
Productrice : Liza Benguigui
Production : Elemiah / France 3 Cinéma / Canal + / Ciné +
Distribution : Apollo Films
Pays d’origine : France
Genre : comédie
Durée : 102 minutes
Dates de sortie : 9 janvier 2019
Distribution
Audrey Lamy : Audrey
Noémie Lvovsky : Hélène
Corinne Masiero : Manu
Déborah Lukumuena : Angélique
Pablo Pauly : Dimitri
Sarah Suco : Julie
Tassadit Mandi : Ramouna
Brigitte Sy : Béatrice
Guillaume Cloud Roussel : Baptiste
Adolpha Van Meerhaeghe : Chantal
Marianne Garcia : Marianne
Marie-Christine Orry : Catherine Paraire
Fatsah Bouyahmed : Esteban
Antoine Reinartz : Adjoint au maire
Distinctions
Prix de la Meilleure Réalisation lors de la première édition du Festival International du Film Politique de Carcassonne.
Prix Chabrol Coup de coeur du Jury, Chabrol du Public et Chabrol du Jeune Public au Festival du Film du Croisic.
Prix du Public au Festival International du Film de Pau.