C’est l’histoire d’une histoire.
C’est l’histoire d’une petite fille, intrépide et curieuse, qui vit dans un monde d’adultes.
C’est l’histoire d’un aviateur, excentrique et facétieux, qui n’a jamais vraiment grandi.
C’est l’histoire du Petit Prince qui va les réunir dans une aventure extraordinaire.
On pourrait débattre des heures sur la légitimité d’une adaptation du chef d’œuvre de Saint Exupéry au cinéma. On pourrait aussi lyncher cette même adaptation maintes fois pour une infinité de raisons. Mais le mal est fait et est signé Mark Osborne. Alors quitte à donner son avis, autant juger le produit final pour ce qu’il est et non pour ce qu’il n’est pas… Et vu sous cet angle, laissez moi vous dire que le résultat n’est pas si mal.
« L’essentiel est invisible pour les yeux. On ne voit bien qu’avec le cœur. »
Mais c’est que la besogne n’est pas une mince affaire à adapter… Plusieurs scénaristes se sont déjà cassés les dents sur l’histoire du Petit Prince (Stanley Donen et Orson Welles notamment). A l’initiative du français Dimitri Rassam, l’œuvre reprend le chemin des studios de cinéma en 2006 et va mettre neuf années à se concrétiser. Car en plus d’être un chef-d’œuvre vendu à quelques 145 millions d’exemplaire à travers le monde, Le Petit Prince n’est pas particulièrement long ni vraiment adapté à l’adaptation cinématographique. Pour nous offrir un récit qui tienne la route, les scénaristes Irina Brignull (Boxtrolls) et Bob Persichetti vont opter pour une mise en abyme et adapter le Petit Prince sous la forme d’une histoire dans l’histoire. L’idée était de construire une structure plus large pour placer l’œuvre au cœur du récit et de nouer la fantasmagorie de Saint-Exupéry à une satire sociale. Ainsi, le personnage principal devient la petite fille et le Prince et l’aviateur sont relégués au titre de personnages secondaires, acteurs de son éveil au monde ; tandis que la petite planète, la rose, le vaniteux, le roi ou le renard sont carrément remisés au statut d’accessoires ou de décors. La tentative consécutive à la manœuvre étant de faire du point de vue innocent de la petite fille une projection du lecteur face à cette histoire incroyable qui va bousculer sa vision de la vie. Si ce parti-pris dénaturant peut agacer, il s’avère très bien exploité dans une narration qui va, comme tout bon film d’animation qui se respecte, prôner quelques bonnes valeurs et bons sentiments, sans pour autant réduire son propos à la simple morale « conserver son âme d’enfant » et dans ce sens, le produit final fait honneur au matériau d’origine. Si l’hymne à l’innocence est plus limpide que dans le bouquin, on aborde avec justesse et sans raccourcis des thèmes comme l’amour, la mort, la solitude et les regrets.
« Dessine-moi un mouton »
Ce qui frappe aussi dans le Petit Prince d’Osborne, c’est son parti pris esthétique très franc. L’illustration fait écho au scénario qui nous conte deux histoires et, l’air de ne pas y toucher, nous dresse un spectacle très manichéen. Surement inquiets de ne pas réussir à convaincre les lecteurs du roman, les créatifs ont souhaité faire la part belle aux illustrations de Saint Exupéry en racontant la version de l’aviateur (l’histoire du livre donc) en stop-motion, technique image par image censée faire plus vrai et nous rappeler les pages du livre. Sur ce point là, on adhère. Le hic, c’est qu’en face, les images de synthèses font pâle figure et sont même par moment franchement hideuses. D’autant que, partis sur leur lancée, ils forcent l’opposition visuelle avec des codes rabatus (le jardin du vieillard chatoyant face au monde grisâtre et compartimenté des adultes qui ont oublié de rêver...).
Toute la créativité picturale se retrouve dans la phase de narration de l’aviateur et fait d’ailleurs directement écho à l’allégorie du roman. Les passages oniriques constituent la force du film, sublimés par la musique de Hans Zimmer et Camille.
Production internationale oblige, un nombre incalculable de noms célèbres est venu se greffer au projet : James Bridges, James Franco, Rachel McAdams pour la VO et André Dussolier, Florence Foresti, Vincent Lindon ou encore Guillaume Canet pour la VF. Une distribution prestigieuse qui manque sérieusement de présence. Mention spéciale pour Marion Cotillard qui doit avoir trois répliques dans le rôle de la rose mais qui pour la peine interprète les voix VO et VF (ouf).
A l’arrivée, difficile de se prononcer franchement ou de donner une note précise au Petit Prince de Mark Osborne. Il nous raconte une belle histoire autour du célèbre conte sans trop dénaturer la matière première. Ce qui est déjà pas mal. Du coup on est plus dans la variation que dans l’adaptation proprement dite. D’ailleurs, qu’on se le dise, il ne s’agit là que d’une interprétation du Petit Prince. L’œuvre de Saint Exupéry est si complexe que cette version, si jolie soit elle, n’est pas à graver dans la pierre pour autant. Mais quoi qu’il en soit, pour celui qui entre dans la salle sans préjugé, le film de Osborne peut se révéler sincèrement agréable.
Eve Brousse
Fiche technique
Réalisation : Mark osborn
Scénario
Scénariste Irena Brignull, Bob Persichetti, D'après l'oeuvre d’Antoine de Saint-Exupéry
Soundtrack
Compositeur Hans Zimmer, Richard Harvey, Camille Dalmais
Production
Producteur Dimitri Rassam, Aton Soumache, Alexis Vonarb
Producteur exécutif Moritz Borman, Camille Cellucci, Paul Rassam, Jinko Gotoh, Mark Osborne, Thierry Pasquet,
Producteur associé Brice Garnier, Olivier Rakoto
Equipe technique
Directeur de la photographie Kris Kapp
Monteur Matt Landon, Carole Kravetz Aykanian
Directeur artistique Céline Desrumaux, Lou Romano
Directrice du casting Sarah Finn
Directeur de production Jean-Bernard Martinot
Mixage Christopher Barnett, Tim Nielsen
Superviseur du design sonore François Bordez
Monteur son Tim Nielsen
Directeur artistique effets visuels Jamie Caliri, Alexander Juhasz
Superviseur des effets visuels Alex Parkinson, Pascal Bertrand
Directeur de l'animation Jason Boose
Superviseur animation des personnages Jérémy Ringard
Création graphique des personnages Peter de Sève
Animateur Jean-François Barthélémy, Marc-André Baron, Anthony Scott
Layout Arnaud Ceysson
Superviseur de production Jocelyne Perrier
Concepteur de production Corinne Merrell
Directeur technique Pascal Bertrand
Chef éclairagiste Adel Abada, John Brooks, Olivier Rakoto
Durée : 1h46
Distribution
Attachée de presse Michèle Abitbol-Lasry
Attachée de presse Séverine Lajarrige
Sociétés
Production On Animation Studios, Onyx Films, Paramount Pictures, Orange Studio, LPPTV, M6 Films, Paramount Pictures France
Distributeur France Sortie en salle : 29 Juillet
Distribution :
• Andrea Santamaria : le Petit Prince
• Marion Cotillard : la rose
• Clara Poincaré : la petite fille
• Vincent Cassel : le renard
• Guillaume Gallienne : le serpent
• Florence Foresti : la mère
• André Dussollier : l'aviateur
• Laurent Lafitte : le vaniteux
• Vincent Lindon : l'homme d'affaires