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affiche Le labyrinthe du silence

Le labyrinthe du silence

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Un film de Giulio Ricciarelli ,
Avec Alexander Fehling, André Szymanski, Friederike Becht,

Genre : Historique
Durée : 2h03
Allemagne

En Bref

Dans les années 1958, l’Allemagne se remet difficilement de la Seconde Guerre mondiale. Elle semble avoir la mémoire qui flanche sur certains sujets, notamment Auschwitz et le génocide d’un peuple. Après le procès de Nuremberg, les criminels furent jugés et l’affaire rangée dans les couloirs sombres de l’histoire. Il fallait reconstruire le pays, redresser la tête, échapper à un lourd passé nazi, aller de l’avant. Pourtant, un homme, le procureur Fritz Bauer n’oublie pas. Il soutient l’un de ses jeunes adjoints, Johann Radmann, dans sa quête de vérité. Suite à une plainte, dont personne ne souhaite inscrire la procédure, il se lance sur la piste des anciens criminels nazis. Il ouvre la boite de Pandore ! Qui soupçonnerait un brave professeur d’école, un boulanger, des individus normaux dans une société qui cherche à retrouver sa normalité, d’être des criminels ? Pour la majorité des jeunes Allemands, les assassins sont en fuite ou en prison.

Auschwitz n’existe pas, rayé de la mémoire tout simplement. Un jeune procureur lutte contre ses collègues et particulièrement l’un de ses supérieurs qui pose la question cruciale. « Est-ce vraiment utile que tous les jeunes Allemands se demandent si leur père est un meurtrier ? » Peu à peu, contre vents et marées, avec obstination, il découvre à travers les témoignages des victimes l’ampleur de la monstruosité perpétrée par son peuple. En fouillant dans les archives saisies par les Alliés, aidé par le journaliste Thomas Gnielka, il exhume une vérité qui touche non seulement ses concitoyens et amis mais aussi lui-même. Au bout de six ans de lutte, il finit par placer devant l’histoire la responsabilité de l’Allemagne. Elle devient le premier pays à poursuivre et juger ses criminels de guerre.


Giulio Ricciarelli réalise une mise en scène classique, le film ne marque pas dans sa forme, mais sur le fond. Le sujet et les questions qu’il soulève suffisent à le sortir de l’ordinaire. Nous passerons sur l’histoire d’amour assez convenue. Malgré tout, elle montre cette Allemagne qui cherche à aller de l’avant. C’est la quête de ce jeune homme, fils de soldat, enfant pendant la guerre, sa vision en reste trouble. Le procès devient pour lui le moyen de comprendre le poids de la faute et l’ampleur de celle-ci. C’est d’abord une voix, un témoignage sans visage, juste les mots qui s’envolent et deviennent tempête. Puis un, deux, et c’est 360 témoins racontant l’horreur d’un génocide. Il a l’intelligence de ne pas jouer la carte de l’illustration, de revenir sur les camps, au contraire il laisse notre mémoire et les mots s’animent dans notre inconscient s’appuyant sur le devoir de mémoire fait depuis.

Nous imaginons ce jeune homme prenant tout à coup en pleine face la démesure, le choc de ce qu’on voulait effacer. Sur 6000 anciens SS ayant servi à Auschwitz, seulement 22 comparaissent sur le banc des accusés. Six sont condamnés à la prison à vie pour meurtre ou complicité de meurtre. Onze seront condamnés à 14 ans de prison, 3 acquittés, et 2 meurent avant de comparaitre. A travers son personnage, le film nous montre le choc que vivra tout un pays, le degré d’implication dans le système. Les jeunes enrôlés de force, ceux qui adhèrent, n’ayant pas le choix, d’autres par conviction, par intérêt. La question devient plus complexe, moins manichéenne. En 1952, Bauer avait déjà œuvré à la réhabilitation des auteurs de l’attentat contre Hitler. Nommé procureur général de Francfort, il laisse son jeune magistrat mener sa quête pour l’appuyer par la suite.

C’est l’occasion pour la fiction de dévoiler ses liens avec le Mossad et de belles scènes sur le passé avec le jeune Johann Radmann. C’est donc dans son discours et les questions qu’il soulève que le film trouve sa force. La plus importante pour l’Allemagne étant bien entendu celle soulevée par son patron : « Est-ce vraiment utile que tous les jeunes Allemands se demandent si leur père est un meurtrier ? » Elle se pose pour tous les génocides et dictatures. C’est en ne laissant rien de côté que le film devient intéressant et rejoint le devoir, la transmission de la mémoire. Giulio Ricciarelli est suffisamment intelligent pour ne pas en faire un dogme, ni de le rendre moralisateur mais bien de faire face à son passé. C’est ce qu’ont dû faire les jeunes Allemands à l’époque du procès, comme le montre le personnage du jeune procureur. C’est quand enfin il accepte ce poids pour mieux bâtir son avenir que tout devient possible.

De la même façon, il interroge sur la faute des pères, doit-elle systématiquement rejaillir sur les héritiers ? Bauer à l’époque utilisait cette maxime : « Personne n’a le droit d’être obéissant », plaidant le devoir de dire non face à des actes inhumains comme ceux demandés par les Nazis. A travers l’un des personnages du film, il montre que la réponse n’est pas si évidente et le poids, lourd à porter. Le labyrinthe du silence une fois le fil d’Ariane déroulé, nous montre qu’il n’est pas si silencieux.

Patrick Van Langhenhoven

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Edition :


Titre original : Im Labyrinth des Schweigens

    Titre international : Labyrinth of Lies

    Réalisation : Giulio Ricciarelli

    Scénario : Elisabeth Bartel et Giulio Ricciarelli

    Direction artistique : Manfred Döring

    Décors :

    Costumes : Aenne Plaumann

    Photographie : Roman Osin

    Son : Günther Gries

    Montage : Andrea Mertens

    Musique : Sebastian Pille

    Production : Jakob Claussen et Ulrike Putz

    Sociétés de production :

    Distribution : Universal Pictures (Allemagne)

    Budget :

    Pays d’origine : Allemagne

    Langue : allemand

    Format : Couleur

    Genre : Drame historique

    Durée : 120 minutes

    Dates de sortie :

Distribution

     Alexander Fehling : Johann Radmann

    André Szymanski : Thomas Gnielka

    Friederike Becht : Marlene

    Johannes Krisch : Simon Kirsch

    Johann von Bülow : Otto Haller

    Gert Voss : Fritz Bauer