Cine-Region.fr
affiche Le combat ordinaire

Le combat ordinaire

___

Un film de Laurent Tuel ,
Avec Nicolas Duvauchelle, Maud Wyler, André Wilms,

Genre : Drame psychologique
Durée : 1h40
France

En Bref

Marco a de la misère avec la vie, elle est un spleen continuel, comme les poèmes de Baudelaire. Elle le ronge de l’intérieur. Chaque jour est un combat ordinaire contre les petits riens, circuler sur l’autoroute, aimer, affronter le dehors. Photographe de guerre, nous supposons que la vision d’un monde chaotique finit de le mettre KO. Il raccroche les gants, jette l’éponge. Il est prêt à faire du calendrier, de la photo de mariage, n’importe quoi pour être loin de la faucheuse. Il se réfugie à la campagne dans la solitude, en Dordogne, entre vallons, collines et ruisseaux enchanteurs où se forger une âme bucolique.

Hélas, il existe toutes ses appréhensions à affronter, la vie et son quotidien banal. Il croise la route de Mouret, un voisin pêcheur qui lui ramène son chat Adolf. La bête trouve une plus forte tête. C’est l’occasion de rencontrer la petite véto du village et d’engager la parade des amours anciennes aux couleurs de l’été. Retour aux sources chez ses parents. Il découvre un père atteint de la maladie d’Alzheimer, au bord du quai, prêt à prendre le dernier navire. Des révélations cachées, le suicide du père, les engagements  amoureux à ne pas fuir, un reportage sur les dockers collègues de travail de celui-ci, autant d’écueils à franchir pour enfin prendre la vie du bon côté.


Après le tour de France, La grande boucle, Laurent Tuel  adapte la bande dessinée de Manu Larcenet Le combat ordinaire. Manu Larcenet refusait l’adaptation au cinéma, ça ne l’intéressait pas. Le réalisateur montre une série de photos sur les lieux de tournage à l’auteur qui se laisse séduire. Il adapte trois des albums sur les quatre, le dernier avec Maude, sa fille, clôturant la série, appartient à un autre projet peut-être. Dans le rôle de Marco, Nicolas Duvauchelle s’en sort plutôt bien. André Wilms campe un repenti assez convaincant. Olivier Perrier dans celui du père de Marco reste émouvant. Le combat ordinaire, c’est celui que nous menons contre la vie pour nous inscrire dans sa route et affronter le quotidien. Il nous transforme parfois en héros face à nos peurs, nos angoisses à dépasser. Toute la BD de Larcenet montrait avec son style particulier entre émotions, ironie et rire, comment Marco finit par prendre sa vie en main au lieu de la fuir, de la craindre.

C’est d’abord la famille, le retour en son sein. La seule relation stable comme dans la BD est celle qu’il entretient avec son frère. Il retrouve le père diminué, dans un début d’Alzheimer où l’oubli, forcément, l’interpelle et le sonne. Quand il découvre les carnets intimes de celui-ci, il constate que comme Louis XVI, il ne notait que des faits anodins. Aucun mot sur lui ni sur son frère, sur son travail, ses luttes. La dernière ligne, des souris on fait leur nid dans un coin de l’atelier. Son suicide bouscule Marco, comment affronter la vie, si au final,  nous la quittons sans mener le dernier combat ? Dans ce chant, la vie et la mort s’incarnent pour creuser l’âme et vous rappeler combien elles sont liées.

L’amour ne tarde pas à montrer le bout de son nez, fait de hasard et de promesses, peu de mots. Au moment de s’engager, il faut affronter la grande peur de vivre à deux. Trop dur, trop de craintes qui finissent par gagner la première bataille, mais peut-être pas la guerre. Il préfère dans un premier temps la fuite. Marco trouve dans son projet sur les dockers, à la fois un hommage aux hommes de son enfance, les camarades de son père et l’envie de reprendre la photo. Des hommes confrontés au quotidien qui les harcèle, les jette à terre, le chômage, la politique et le FN. Enfin, c’est la guerre d’Algérie et ses cadavres dans le placard. Comment le vieux pêcheur philosophe, l’aidant à surmonter la crainte de la vie à deux, peut-il être un ancien salopard. Ce personnage incarne toute la dualité de notre existence, la minuscule frontière entre bien et mal, plus souvent dans les gris.

Manu Larcenet traitait tout cela à travers une poésie fragile, entre existence et nature. Des petites phrases qui en disent long, des rires, et des peurs, des mots doux et pas mal d’ironie composaient cette symphonie à la gloire de la vie. Elle éclate avec Maude, la promesse du futur incarnée. Nos enfants portent la trace de nos sourires et de nos désirs. Laurent Tuel choisit une mise en scène froide, s’appuyant souvent sur la neurasthénie du personnage, paysages froids, proches du documentaire. C’est justement sur les moments de douleur, l’Alzheimer, l’enterrement du père, les dockers, qu’il touche le récit, mais en oublie la vie.

L’histoire d’amour, la nature, le vivant ne s’envolent jamais. La Dordogne avec ses paysages magnifiques ne transparait jamais. Certains dialogues tirés de la BD, parfois noyés dans la trame, se  perdent et ne font pas mouche. Il laisse une sensation de trop de thématiques jamais approfondies.  Il ne s’empare pas de l’âme pour la sublimer et lui donner une autre variation comme dans Lulu femme nue. C’est dommage… Le spectateur finit par perdre pied et s’égarer, lâcher prise. Réalisateur éclectique touchant à tous les genres, nous avions aimé son Jean-Philippe, nous aurions aimé en dire autant sur Le combat ordinaire.

Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
Support vidéo :
Langues Audio :
Sous-titres :
Edition :


Titre original : Le Combat ordinaire

            •            Réalisation : Laurent Tuel

            •            Scénario : Laurent Tuel1, d'après la bande dessinée Le Combat ordinaire de Manu Larcenet (Éd. Dargaud, 2003)

            •            Décors : Anne-Charlotte Vimont2 et Pascal Chatton

            •            Costumes : Alexia Crisp Jones2

            •            Photographie : Thomas Bataille2

            •            Son : Xavier Griette2

            •            Montage : Stéphanie Pelissier2

            •            Musique : Cascadeur3

            •            Production : Christophe Rossignon et Philip Boëffard

            •            Sociétés de production : Nord-Ouest Films ; Paris-Brest Productions, Canal+ et Ciné+ (coproductions)1

            •            Société de distribution :  Haut et Court1

            •            Pays d'origine : France

            •            Langue originale : français

            •            Format : couleur

            •            Genre : comédie dramatique

            •            Durée : 113 minutes

            •            Date de sortie :  France : 15 juillet 2015

Distribution

            •            Nicolas Duvauchelle : Marco

            •            Maud Wyler : Émilie

            •            André Wilms : Moret

            •            Liliane Rovere : la mère de Marco

            •            Olivier Perrier : le père de Marco

            •            Jérémy Azencott : Gilles

            •            Randiane Naly : Naïma

            •            Gérard Bohanne : Pablo

            •            Ludovic Berthillot : Bastounet

            •            Bernard Nissile : le psy

            •            Fabienne Babe : la fille Moret