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affiche Le beau monde

Le beau monde

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Un film de Julie Lopes Curval ,
Avec Ana Girardot, Bastien Bouillon, Baptiste Lecaplain,

Genre : Comédie romantique
Durée : 1h35
France

En Bref

Alice file sur ses vingt ans, il est temps de choisir un métier, de tracer la route vers l’âge adulte. Elle brode, délie la laine et refile le mauvais coton les transformant en petits bijoux de tissus qui s’élancent et dansent sous ses doigts en mille formes et couleurs. Elle profite de la sympathie d’une bourgeoise de la région pour lui soumettre son dossier d’entrée à l’école prestigieuse d’art et de mode. Elle croise le fils de cette dernière. Rebelle à la volonté de sa classe, il souhaite se lancer dans la photographie. Un regard, un froissement de sentiments, un rien s’échangent avec Alice et les cœurs battent à l’unisson pour s’envoler dans le parfum diaphane du nouvel amour. Ils décident d’arpenter les débuts de la route ensemble, de construire les prémices d’une vie sous le même cerisier.

Elle se lance dans ses études et emménage chez lui. Il continue de chercher sa voie à travers l’œil de son appareil photo. Ce sont deux univers éloignés, la petite fille prolétaire et le garçon du beau monde décident de briser les conventions et de s’aimer tout simplement. La question ! Cet amour si grand si beau comme le chanterait le poète résistera-t-il aux différences de classe, au temps qui passe et à la volonté de chacun ? Ces deux accepteront-ils les sacrifices nécessaires à leur histoire ou s’évanouira-t-elle dans l’espace comme une fleur se fane l’automne venu.


Comme pour Pas son genre de Lucas Belvaux, la différence de classe semble un sujet revenu à la mode ces derniers temps. Julie Lopes Curval construit un film tout en douceur, à l’image de son héroïne passionnée par les motifs floraux. Elle passe ainsi de la rose rouge de l’amour au pavot, fleur de la mort et du rêve, de l’initiation. Dans un deuxième temps l’apprentissage de l’amour s’accompagne de celui de la vie et de son métier pour l’un comme pour l’autre. Chacun permet à l’autre de se construire, de bâtir les éléments de sa quête artistique et amoureuse. Alice trouve autant de réponses à ses questions et ses égarements dans le beau monde qu’Antoine dans l’univers prolétarien d’Alice. Ce dernier lui sert de tremplin pour affirmer ses choix artistiques. Alice, comme le papillon, est attirée par ce beau monde qui paraît idyllique, charmant comme le lapin de l’autre Alice.

Elle s’apercevra que derrière les façades se cache un autre univers moins sympathique. Le récit amorce alors le conflit des classes à travers une série de clichés symboliques, comme cette conversation de la mère d’Antoine sur celle de la petite. Sur cette thématique autant Alice qu’Antoine du haut de leurs vingt ans cherchent à s’émanciper de leur univers pour trouver le leur. Nous n’échappons pas à nos racines. Nous pouvons nous en servir pour grandir et progresser. Il nous faut juste comprendre qu’elles appartiennent à notre construction, qu’elles participent à faire de nous ce que nous sommes.

En parallèle, et en filigrane, se joue une autre construction plus intéressante, celle de l’artiste. Le film évoque alors une autre question, celle du sacrifice amoureux. Autant Alice pourrait sacrifier son apprentissage artistique pour l’amour, autant Antoine non, et c’est ce qui achève leur belle histoire. Il préfère courir le monde pour parfaire son apprentissage au risque de perdre celle qu’il aime. Derrière une mise en scène classique, des images d’Épinal parfois, des clichés pour reprendre la photo, la réalisatrice construit une autre partition. Celle du regard tout d’abord, photo et broderie devenant un choix voulu. Il renvoie au regard sur le monde à travers les fils que l’on tisse ou l’objectif. Il n’apparaît jamais dans sa réalité, son origine. Comme Pénélope ou Mathilde avec la tapisserie de Bayeux, Alice fait et défait l’ouvrage pour atteindre la perfection ou le retour de l’amour.

Elle passe ainsi de la laine qu’elle teinte aux couleurs du monde qu’elle imagine à la broderie plus fine, plus délicate. Alice, personnage central, est ce bouton de rose qui finit par éclore et devenir mille pétales fragiles bercés par le vent. Le regard pose aussi la question de l’art et de son appréhension, thématique également revenue à la mode. À savoir c’est opposer la connaissance intellectuelle, dogmatique au premier regard, à nos sens et à ce qu’il éveille en nous. C’est le jeune novice et sa virginité face au vieux pratiquant, s’enfermant dans son dogmatisme. Nous le voyons au-delà de l’envie d’une jeune fille de pénétrer le beau monde, il soulève bien plus de questions sur ce que nous sommes et voulons être. 

 Patrick Van Langhenhoven

Note du support :
3
Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 1.85, Format DVD-9
Langues Audio : Français Dolby Digital 2.0, Français Dolby Digital 5.1
Sous-titres : aucun
Edition : Pyramide vidéo

Bonus:

Making of (15')

Ciné Région : Vous vous sentez proche d’Alice, votre personnage ?

Ana Girardot : Alice est quelqu’un qui a du mal à dire ce qu’elle pense parce qu’elle est dans la retenue, dans l’observation et qu’elle est très timide. Je me suis en effet beaucoup reconnue dans ce personnage puisque, plus petite, j’étais beaucoup comme ça, j’observais énormément et j’avais beaucoup de mal à dire ce que je pensais ou à exprimer mon opinion. Il y a une force qui existe en elle mais elle ne veut pas l’utiliser, elle n’a pas de choses mauvaises en elle. Je pense que c’est une fille très mal dans sa peau. Quand on a choisi les vêtements, on voulait que les couleurs soient accordées parce que c’est une jeune fille qui a du goût, mais qui soient un peu cheap, sans style. Et puis on a pris des chaussures dans lesquelles j’étais très très mal, des chaussures en plastique très inconfortables. Et au moment où j’allais demander à ce qu’on les change, je me suis dit : « Mais non en fait, c’est ça qu’il faut, pour me sentir mal dans mes baskets, littéralement ».

C.R : Comment avez-vous surmonté votre timidité dans votre métier ?

A.G : Surement grâce à mon entourage, je commençais à m’imposer dans mes cercles d’amis, et je suis partie vivre à New-York. Là-bas, on est obligé de dire et faire de qu’on pense, être ouvert et exprimer ce qui passe par la tête. Au bout de trois mois à New-York, j’étais beaucoup plus ouverte, beaucoup plus affirmée, indépendante et forte. J’avais beaucoup à prouver en partant là-bas, à mes parents, à moi-même.

C.R : Vous vouliez être actrice en raison de votre père ?

A.G : Pas du tout, je ne voulais pas être comédienne au départ, je voulais travailler dans le cinéma mais plus dans le journalisme. Et pour rejoindre un garçon à New-York, j’ai pris des cours de théâtre et c’est là que j’ai eu le déclic. Quand je suis revenue, j’étais décidée à m’investir toute ma vie dans ce métier, avec passion.

C.R : Comment votre père a-t-il pris le fait que vous vouliez vous lancer dans le cinéma ?  

A.G : Il l’a bien pris mais il était triste que je parte de la maison, c’est surtout ça. D’un autre côté, il avait peur que ce soit une sorte de facilité qui m’était donnée, que je me dise : « Je suis née là dedans, j’ai eu mon bac mais je ne suis pas prête non plus à faire de grandes études, donc allons-y ! ». J’ai quand même eu droit à quelques tapages de point sur la table en me disant en gros : «  Tu n’es pas obligée de faire ça parce que tu as ça devant toi ». J’ai réussi à le convaincre que j’aimais réellement ça : jouer, travailler les personnages… Finalement, quand je suis revenue de New-York, j’ai passé le casting de Simon Werner a disparu, il s’est tourné un mois après. Mon père est venu en secret à la projection de Cannes et m’a dit : « C’est bon, voilà les clés de la boutique, fais en bon usage. »

C.R : Quels sont vos projets dernièrement ?

A.G : Alors j’ai fait Le Beau Monde, j’ai fait aussi un film avec Guillaume Canet, la prochaine fois je viserai le cœur, un thriller de Cédric Anger sur un tueur de l’Oise. Je joue également Roméo et Juliette au théâtre et je tourne ensuite un film de Pierre Niney, Un homme idéal.

Interview réalisé par Patrick Van Langhenhoven retranscrit et mis en forme par Eve Brousse

Titre : Le Beau Monde

    Réalisation : Julie Lopes-Curval

    Scénario : Sophie Hiet, Vincent Mariette et Julie Lopes-Curval

    Photographie : Céline Bozon

    Montage : Muriel Breton

    Musique : Sébastien Schuller

    Producteur : Fabienne Vonier, Francis Boespflug et Stéphane Parthenay

    Production : Pyramide Production et France 3 Cinéma

    Distribution : Pyramide Distribution

    Pays d'origine : France

    Genre : Comédie dramatique

    Durée : 95 minutes

 Distribution

    Ana Girardot : Alice

    Bastien Bouillon : Antoine

    Baptiste Lecaplain : Kevin

    Aurélia Petit : Agnès

    Sergi López : Harold

    India Hair : Manon

    Stéphane Bissot : Christiane

    Jean-Noël Brouté : M. Jacquard

    Michèle Gleizer : Arlette

    Jean-Alain Velardo : Fernando