Elles s’appellent Lili, Rose et Hélène, la vie les marque des ténèbres d’Auschwitz. Elles pensaient être deux survivantes de la longue marche de la mort au sortir de l’enfer. En 1960, elles se retrouvent à trois à Berck-Plage pour une semaine de retrouvailles. Au temps de l’orage et des pleurs, elles préfèrent celui de la joie de vivre. Les fantômes veillent et reviennent. Pour trouver le chemin de la paix, ils devront mourir définitivement. Elles reprendront la route de l’existence avec la promesse, de se revoir chaque année et de profiter du soleil sur l’océan. Jean Jacques Zilbermann préfère l’optimisme à la noirceur de l’âme.
Il prend la voie du bonheur pour, dans la veine de Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes, retracer une partie de la vie de sa mère. Il s’est longtemps interrogé sur la nécessité de montrer le drame d’Auschwitz, élément incontournable pour expliquer la suite. En quelques images, sans plonger dans les ténèbres, il pose la douleur qui lie ces trois femmes. Ensuite il se concentre sur le retour à l’existence et la félicité de ces petits riens qui nous font nous sentir vivants. Un film où la légèreté n’enlève rien à la profondeur du récit.
Elles s’appellent Lili, Rose et Hélène, la vie les marque au fer rouge de la peur et la mort d’Auschwitz. C’est ici dans l’ombre de la folie que nait leur amitié, ce lien indéfectible qui les protège contre le raz de marée d’une époque où on mettait les morts à table. La nuit voit toujours poindre l’aurore des lucioles, les rayons du soleil jouant dans le vent renaissance, renouveau. C’est presque la fin. Elles filent le long des baraquements, ombres souhaitant se fondre dans le néant pour l’oubli. Elles se retrouvent dans la longue marche de la mort sans Rose, broyée dans la tempête avant l’espoir. Hélène tente de reprendre le cours d’une vie brisée dans la violence d’un génocide.
Elle retrouve son appartement, les rues de son enfance, la ville figée. Peu à peu, elle réapprend à vivre, sourire, espérer, raccrocher des guirlandes de joie à la vie. Elle cherche son amie perdue, Lili, partie là-bas ailleurs au temps meilleur. 1960, enfin le jour des retrouvailles arrive, la nuit est lointaine, mais les fantômes encore présents. Lili reçoit un cadeau en plus de la présence de Lili, Rose que l’on croyait morte. Pour ces trois femmes, cette semaine de retrouvailles, de bonheur, devient celle des revenants du passé qui vous hante. Il est temps de briser les silences, de jeter les douleurs qui vous minent de l’intérieur. C’est la vie, l’espoir, le bonheur qu’il faut reconstruire sur les fondations d’une maison où les fantômes ont été exorcisés à jamais.
Jean-Jacques Zilbermann est un réalisateur optimiste, cela lui vient peut-être de sa mère ayant traversé l’enfer ! Elle ne garde que les joies du paradis. Après Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes, il choisit une période plus sombre, celle de l’après-guerre et les retrouvailles de trois femmes perdues. Il n’est jamais plus inspiré et meilleur que quand il utilise sa propre histoire comme sujet. Il évacue en quelques images la noirceur du récit, le temps de la mort et de la peur, deux ombres glissant le long des cabanes de bois, un dortoir où des formes squelettiques rappellent l’horreur d’un « temps déraisonnable », comme le dira Aragon. Il préfère voir de loin la longue cohorte de la marche de la mort, un soldat abat un trainard, tout est dit.
Il n’en faut pas plus pour nous rappeler, nous ramener ces images que nous avons vues maintes fois sur l’abjection des camps et la folie monstrueuse. Il leur préfère le retour à la vie, comment revenues de l’enfer elles tentent de s’accrocher de nouveau à la route fleurie. Hélène retrouve ses amies, s’en fait d’autres, épouse son amour de jeunesse, lui aussi marqué dans sa chair et son âme. L’histoire raconte une quête profonde et généreuse, celle du retour à son âme. Il reste encore des fantômes, ceux qui connurent cette période comprendront. Il faut trouver ceux qui nous aident à tenir, à survivre dans le feu du néant. La deuxième partie du film dévoile tout ce chemin pour enfin tuer le passé, ne pas le laisser vous anéantir. Entre deux balades à la plage, une glace sous la chaleur du jour, le sourire d’un moniteur, la parole se libère. Elle monte, d’abord pénible, puis devient libératrice. Chacune de ces femmes traine son fardeau. Chacune à leur façon, elles masquent la douleur, contournent l’écueil, Hélène dissimule son traumatisme dans sa solitude et sa quête de l’autre. Lili romancière reconnue au Danemark, tire un trait sur ce passé qu’elle oublie. Rose montre une attitude plus ambiguë en gardant un secret enfoui et dans le refus de parler de l’internement. C’est donc dans ce moment des retrouvailles, quand les fantômes reviennent pointer leurs suaires malsains dans le bonheur retrouvé, qu’elles les exorciseront à jamais. Jean-Jacques Zilbermann montre bien les effets des ronds dans l’eau, comme un caillou jeté qui continue à secouer la rive calme.
De la même façon, il s’attarde avant la semaine à Berck sur le poids du retour. Hélène retrouve une maison figée dans le temps, rien n’a bougé, les couverts sont encore là, mais elle est la seule de retour. Nous comprenons mieux la difficulté du retour et de la réinsertion dans la société. Comment aimer, retrouver la chaleur, l’envol des corps, le physique, quand on a souffert dans sa chair. Lili ne cherche plus, Rose se voue à ses enfants et Hélène est encore en recherche d’un amour perdu. Elle le trouvera peut-être dans les bras de cet amour d’enfance. Hélas, lui aussi meurtri dans sa virilité par les tortures ne peut plus.
Alors, il faudra trouver ailleurs au risque de tout perdre. Certains reprocheront à Jean-Jacques Zilbermann de rester en surface, de ne pas plonger au cœur, fouiller ses personnages un peu plus, étaler leurs douleurs plus en profondeur. C’est un choix, le regard du réalisateur se veut tourné vers l’optimisme, la reconstruction et le chemin qui y conduit, c’est bien comment le bonheur, la force de l’amitié deviennent le lien qui efface les ténèbres. Il y a sans doute aussi un peu de pudeur à ne pas trop étaler la souffrance de sa mère et on ne peut lui en vouloir. En conclusion, tout est dans le titre : à la vie, et non à la mort !
Patrick Van Langhenhoven
Acteurs et actrices
• Julie Depardieu Rôle : Hélène
• Johanna ter Steege Rôle : Lili
• Suzanne Clément Rôle : Rose
• Hippolyte Girardot Rôle : Henri
• Mathias Mlekuz Rôle : Raymond
• Benjamin Wangermee Rôle : Pierre
• Audrey Quoturi Rôle : Invitée mariage
• Anne-Marie Pisani
Acteur Patrick Ligardes
Actrice Béatrice Michel
Actrice Maria Pitarresi
La fille de la concierge Chelssy Bottier
Acteur Matthieu Le Garrec
Acteur Maxime Le Garrec
Scénario
Scénariste Jean-Jacques Zilbermann
Scénariste Danièle D'Antoni
Collaboration au scénario Odile Barski
Soundtrack
Compositeur Eric Slabiak
Production
Producteur Denis Carot
Productrice Marie Masmonteil
Equipe technique
Directeur de la photographie Rémy Chevrin
Chef monteur Joële van Effenterre
Chef décoratrice Valérie Grall
Directrice du casting Constance Demontoy
Directeur de production Philippe Roux
1er assistant réalisateur Jean-Christophe Delpias
Chef costumier Olivier Beriot
Scripte Sandra Di Pasquale
2ème assistant réalisateur Frederic Castelnau
Ingénieur du son François Waledisch
Assistante monteuse Chrystel Alépée
Régisseur général Olivier Bonnard
Secrétaire de production Marianne Campos
Distribution
Attachée de presse Florence Narozny
Sociétés
Production Elzévir Films
Exportation/Distribution internationale Le Pacte
Distributeur France (Sortie en salle) Le Pacte