La famille Bélier

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Un film de Eric Lartigau,
Avec Louane Emera, Karin Viard, François Damiens,

Genre : Comédie
Durée : 1h45
France

En Bref

Dans la famille Bélier, tout le monde est sourd sauf Paula, 16 ans. Elle est une interprète indispensable à ses parents au quotidien, notamment pour l’exploitation de la ferme familiale. Un jour, poussée par son professeur de musique qui lui a découvert un don pour le chant, elle décide de préparer le concours de Radio France. Un choix de vie qui signifierait pour elle l’éloignement de sa famille et un passage inévitable à l’âge adulte.

Après la comédie pastiche avec Mais qui a tué Pamela Rose, la romcom avec Prête-moi ta main et le thriller avec L’homme qui voulait vivre sa vie, Eric Lartigau s’attaque aujourd’hui à la comédie dramatique familiale avec La famille Bélier. Pour cela, il adapte un scénario de Victoria Bedos inspiré d’une situation vécue, celle de Véronique Poulain, l’assistante de Guy Bedos. Il raconte l’histoire pas commune de Paula, adolescente entendante au sein d’une famille de sourds. Un argument plutôt délicat qui n’est pas sans rappeler Au-delà du silence, le film allemand de Caroline Link avec Sylvie Testud qui, dans la même situation familiale que Paula, se passionnait pour la clarinette. Une histoire heureuse, un casting charmant, une jolie voix et de bons sentiments, la famille Bélier sort à point nommé pour les fêtes. Un cocktail qui engage certains rêveurs à lui pronostiquer le succès d’Intouchables, ça reste à voir.

Dans la famille Bélier, je veux la fille. Evidemment, on ne peut décemment pas regarder La famille Bélier sans remarquer la jeune Louane Emera qui s’est fait connaitre du public sur le plateau de The Voice 2. Plutôt que de dénicher une actrice qui pouvait chanter, Eric Lartigau a décidé de chercher une chanteuse capable de jouer. Bingo ! La jeune chanteuse de 18 ans offre bien plus que sa voix au film ; son naturel et son air mutin et boudeur viennent compléter la panoplie de cette ado lambda flanquée d’une famille pas commune. Pourtant, la jeune actrice débutante se voit attribuer le rôle le plus difficile du film puisqu’elle doit signer, parler, interpréter et faire vivre son personnage en même temps, ce qui lui vaut parfois peut-être de surjouer un tant soit peu par ci ou de ne pas paraître vraiment sincère par là, mais on lui pardonnera bien volontiers ces quelques glissements de terrain. D’autant que la jeune fille est de presque tous les plans et Eric Lartigau ne va pas hésiter à pointer sa caméra directement sur son visage en émoi lorsqu’elle serre le garçon qu’elle apprécie dans ses bras, en colère contre sa famille ou en pleur…

Pour Paula, il y a comme deux dimensions, celle des entendants, sectaires et exigeants et le monde des sourds, la famille aimante et heureuse. On sent pointer ici une once de manichéisme chez Lartigau, qui va appuyer avec un peu de lourdeur sur la « happy life » de la famille et surtout la sexualité débordante de ses parents. Alors qu’en face, les entendants, ils sont malheureux et ne font plus l’amour depuis des lustres… Bref. Ceci mis de côté, on accueil à bras ouvert ce scénario soigné, bien troussé qui va savoir implanter de vrais moments d’émotion, de rire et de tristesse tout en faisant évoluer son personnage principal aux yeux du spectateur. Au rythme du répertoire de Sardou, Paula va d’abord fuir, douter, s’enthousiasmer puis douter à nouveau et va finalement sauter le pas dans un final, certes couru d’avance, mais terriblement émouvant.

Derrière Paula, il y a donc sa famille et ses parents, Rodolphe et Gigi, cul-terreux de Mayenne attachés à leur ferme et à leurs valeurs. Dans la peau de ces deux sourds, François Damiens et Karin Viard font des merveilles. Ils arrivent vraisemblablement à trouver une certaine liberté de jeu dans la contrainte (signer sans parler) et nous font rire sans avoir à ouvrir la bouche. Il y a aussi Thomasson, le professeur de chant blasé et incompris, trop doué pour cette ville de plouc qui lâche des répliques comme « Le chant c’est votre fausse à purin personnelle ». Là encore, le casting est réussi avec un Eric Elmosnino visiblement enchanté de devoir traiter ce troupeau d’ado de bétail comme des moins que rien face à lui, qui a tout vu dans la capitale.

Accompagnée par le score de Evgueni et Sacha Galperine (Le Passé, Malavita), la petite comédie d’Eric Lartigau se regarde comme un dessert à la suite d’un repas 2014 plutôt lourd. Malgré une mise en scène un peu pesante parfois et un développement cousu de fils blancs, on apprécie et on se reconnaît même un peu dans l’histoire de cette famille Bélier, fédératrice et terriblement salutaire.

Eve Brousse

L'avis de Françoise

Au-delà du film, deux sujets sont en train d’émerger.

Tout d’abord, doit-on engager deux comédiens entendants pour interpréter des sourds ? Il y a les pour, les contre… même parmi les sourds. Contre : il y a en France de nombreux comédiens sourds qu’on voit trop rarement, sauf peut-être à l’International Visuel Théâtre (IVT) situé Cité Chaptal dans le IX^earrondissement de Paris, dont la directrice est Emmanuelle Laborit, elle-même ayant obtenu un Molière pour son rôle dans Les Enfants du silence. La particularité de ce théâtre est précisément de proposer des spectacles accessibles aussi bien pour les sourds que pour les entendants. Pour : voilà l’occasion d’ouvrir une fenêtre de visibilité sur le monde des sourds, avec des acteurs généreux qui mettent leur notoriété au service de « la cause » des sourds.

Ce qui nous amène directement au deuxième sujet : la surdité est-elle une identité ou un handicap ? Manifestement et ils l’ont dit tous les deux lors de différentes interviews, Karin Viard et François Damiens penchent à cent pour cent pour la première option. Ils ont passé six mois auprès d’un professeur de langue des signes et rencontré de nombreuses personnes sourdes. Tous deux expliquent qu’à présent « ils ne peuvent plus considérer la surdité comme un handicap ».

La famille Bélier est un film imparfait mais sympathique, les acteurs y sont sincères, et chose non spécifiée, Luca Gelberg dans le rôle de Quentin, le frère sourd, est un vrai sourd ! Laissez-vous emporter par une vague d’espoir et de bonne humeur, venez découvrir cette famille qui, bien que Bélier ne se classe pas dans la catégorie « moutons » !

Françoise POUL

Note du support :

Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 1.85, Format DVD-9

Langues Audio : Audiodescription (pour malvoyants) Dolby Digital, Français 5.1, 2.0

Sous-titres : audiodescription

Edition :

Bonus:

"À la découverte des Bélier" : making of (24' - avec sous-titres pour sourds et malentendants)
Bande-annonce
Karaoké : "Je vole" et "En chantant"

Fiche technique

· Titre original : La Famille Bélier

· Réalisation : Éric Lartigau

· Scénario : Victoria Bedos et Stanislas Carré de Malberg, On note beaucoup de ressemblances avec le film allemand "Jenseits der Stille" (1996) de Caroline Link.

· Direction artistique : Cyril Péré

· Décors : Olivier Radot

· Costumes : Anne Schotte

· Photographie : Romain Winding

· Son : Cyril Moisson, Frédéric Demolder et Dominique Gaborieau

· Montage : Jennifer Augé

· Musique : Evgueni Galperine et Sacha Galperine

· Production : Stéphanie Bermann, Éric Jehelmann et Philippe Rousselet

· Sociétés de production : Jerico et Mars Films ; France 2 Cinéma et Vendôme Production

· Société de distribution : Mars Distribution

· Pays d'origine : France

· Langues originales : français et langue des signes française