La dernière leçon

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Un film de Pascale Pouzadoux ,
Avec Sandrine Bonnaire, Marthe Villalonga, Antoine Duléry,

Genre : Drame psychologique
Durée : 1h45
France

En Bref

Madeleine, 92 ans, choisit le jour de son anniversaire et quand tous sont réunis dans le cocon soyeux de sa famille, moment de joie et de bonheur, elle lance un caillou dans l’eau vive de ce torrent qui n’en finira pas de faire des ronds dans l’eau. Les jours passent et la diminuent un peu plus comme un arbre perdant ses feuilles, que le froid de l’hiver lamine chaque jour. Il est temps d’entamer la fin du voyage et de mourir dignement. Quand le premier pas du matin se transforme en exploit, que la douleur devient de plus en plus votre compagne et de moins en moins une inconnue de passage, il est temps de prendre la dernière porte pour un autre voyage.

Comme elle le dit "Avant de devenir un poids pour vous et pour moi le moment est arrivé ". Il reste deux petits mois, des milliers d’heures, des millions de secondes pour profiter encore de sa présence avant le deuil et l’absence. C’est peu au regard de toute une vie ou de l’univers. C’est long au regard du temps qui reste. Ce dernier ne possède que la valeur, la durée que nous lui prêtons. Chacun devra faire face à sa manière à cette décision, l’accepter comploter pour faire changer la vieille dame d’avis, quel que soit le choix, c’est la vie qui gagne.

Voir défiler la vieillesse, fuir les mauvais jours, nous ne garderons que les joyeux souvenirs à la dernière kermesse de la vie. C’est le regard que portent les autres sur vous qui vous tue plus sûrement. On ne choisit pas sa naissance, souvent nous ne sommes pas maitres du fleuve de la vie. Il reste une chose que Madeleine peut maitriser pleinement, le moment de sa mort. Cette décision place la famille devant une évidence, nous ne sommes pas immortels. Un jour, ceux que nous aimons devront partir, ouvrir la dernière porte pour un ultime au revoir. Chacun, du plus petit au plus proche prend la nouvelle comme un coup de poing fatal sur le ring de la vie. Les paroles deviennent une certitude. Ils savent que cette femme engagée ne reculera pas. Elle ne s’assoupira pas pour s’endormir dans un dernier souffle, heureuse de ce qu’elle laisse. Elle fait le choix du jour et de l’heure, dans le silence de sa demeure où la vie l’a portée jusqu’au dernier carrefour.

Ce récit sur la mort est parsemé de mille petites choses rappelant la vie, une chanson, un slogan sur un sac de pharmacie, des post-it sur des objets à léguer avec des mots pour les vivants. Plus que le « mourir dignement », c’est le « vivre le temps présent pleinement »qu’ils nous invitent à partager. Chacun face à cette décision évolue, progresse trouve ce qui le grandit face au temps qui reste. Chacun passe par les tons d’un arc-en-ciel du mourant, de l’acceptation au refus, la résignation, et au final, la compréhension. Madeleine n’est pas une vieille femme folle avec une dernière lubie. Le film dévoile par des images anodines, banales, des instants de tous les jours se transformant en calvaire, le point de non-retour. La santé, la vivacité, le bien-être deviennent vulgaires, ils ne reviendront plus.

Mourir dans la dignité ou partir dans la déliquescence des sens, de l’esprit, pour ne plus être que ruine. « On ne force pas les gens à vivre. Elle nous force à la regarder mourir. » Autrefois elle nous tenait fermement pour nos premiers pas, aujourd’hui c’est à nous pour le dernier. Cette décision place chacun face à la mort. Pierre, le fils, est dans le refus. Diane, sa fille, tente de la convaincre de ne pas le faire pour finir par l’accompagner. Le petit-fils joue les branchés, mais au fond de son cœur, il est marqué par cette décision. Cette dernière leçon, la plus grande, leur permet d’affronter avec plus de sérénité la vie qui vient en acceptant la mort.

C’est la dernière leçon du maitre au disciple. En acceptant l’idée de mourir, c’est la vie que nous gagnons. Chaque jour deviendra un moment de plus de bonheur au collier des jours heureux que nous égrènerons quand viendra la dernière heure. La réalisatrice aborde son thème avec pudeur et délicatesse, brasse toutes les questions, les médecins et le serment d’Hippocrate, le corps vieillissant, etc.

Marthe Villalonga, dix ans de moins, est magnifique, tout en douceur et tendresse d’une vieille dame bien décidée à mourir dignement. Sandrine Bonnaire est parfaite avec ce regard plein de tendresse et d’amour pour sa mère. C’est un regard porté sur la vieillesse quand elle devient pesante, qu’elle nous échappe et que le corps ne suit plus l’âme. Alors que le film aborde avec tact et délicatesse le mourir dignement, il est rempli du vivant et du bonheur de vivre.

Patrick Van Langhenhoven