Elle voulait vivre libre, au cœur des paysages sauvages et vierges. Elle suivait sa route au gré des horizons nouveaux. Il suffit d’une rencontre pour que le bonheur illumine son âme et que le chemin s’achève à deux. Richard et Tami étaient faits l’un pour l’autre, comme les deux parties d’une pièce unique. Ils ne se quittent plus. Elle finit sa course dans ses bras déposant son cœur entre ses mains. Ils reprennent la vague et foulent l’océan du bonheur, larguant la voile au vent des désirs. La romance est facile, elle joue les violons de l’âme. Tout semblait idéal dans un petit paradis que l’on se construit loin des tempêtes. Ils décident de convoyer un voilier pour des amis de Richard, une petite balade sans accroc sur la crête des vagues, de Tahiti à San Diego. C’est le paradis, toi, moi et la musique de la mer, avec pour compagnon le crissement de la coque filant vers son destin. Il suffit d’une mauvaise tempête, du fracas du ciel pour que tout vole en éclat. Le bonheur se transforme en enfer, au cœur d’un long hiver de tourments. Elle s’éveille, seule sur l’océan, avant de retrouver Richard blessé. Il ne leur reste que la chance pour rejoindre une côte avant qu’il ne soit trop tard. Est-ce que cette dernière souhaite leur laisser le temps de construire des souvenirs ?
Depuis quelques années, c’est le grand retour le cinéma de survie. Il prend racine avec Jeremiah Johnson, Seul sur Mars, Gravity, The Revenant, Seul au monde, Apollo 13, l’Odyssée de Pi, La route, Survivre, Un homme parmi les loups, Everest, Les survivants, Antarctica, Mosquito, 127 heures, ils marquent la longue lignée d’un genre. C’est la confrontation de l’homme à la réalité de la nature sauvage, quand le moindre faux pas ne pardonne pas. C’est un couple idéal, une famille souhaitant s’isoler du monde, un trappeur blessé, une jeune fille en quête de son âme. Il existe toujours une petite braise cachée au fond de nous qui ravive la flamme, un mirage, une chimère, un nom, un rien. L’important, c’est de le trouver. Après la mer glacée islandaise, Survivre, les sommets de l’Everest, c’est sur l’océan que le danger surgit. Baltasar Kormákur construit une œuvre singulière marquée par 101 Reykjavik, Jar City, 2 guns, Trapped saison 1, Survivre.
Appelé par les sirènes hollywoodiennes, il réalise un premier film de survie réussi, Everest. Il finit de perdre son originalité avec A la dérive et comme de nombreux réalisateurs, il devient un bon faiseur. À l’exemple de Lee Tamahori avec son prometteur L’âme des guerriers, Roger Donaldson Sleeping Dogs, il perd toute la rage et l’originalité de son cinéma pour se couler dans le moule. Comme Everest, A la dérive s’adresse au grand public et respecte un certain nombre de codes pour ne pas le bousculer. Il possède le sens de la symbolique, parfois facile. Elle se concrétise par cette fleur abandonnée aux vagues, cette silhouette vue sous l’eau en contre-plongée. C’est la vision d’un amour éphémère, comme la fleur ne vivant qu’un jour. Il reste gravé dans son cœur pour l’éternité. Le premier plan-séquence Tami jaillit du chaos, de la caverne de l’enfer pour regagner le monde et son ciel étoilé. C’est l’histoire d’un amour plus grand que soi qui lui permettra, au cœur des mauvais jours, de retrouver le chemin de la vie. Baltasar Kormákur nous emporte de l’enfer au paradis en mélangeant le présent et le passé.
Après la tempête, nous revenons au début de cette histoire, une jeune fille en quête de son âme rencontrant le grand amour. Nous pensons au mythe d’Orphée et Eurydice, un amour fou qui vous conduit jusqu’en enfer. Il fallait juste ne pas se retourner. Il est lié à la religion des mystères, l’origine du monde avec les forces de la nature. Comme le pendule marquant le temps du battement de l’horloge, le réalisateur oscille entre paradis, romance sous les tropiques avec lagon bleu et fleur dans les cheveux. Il oppose à ce paradis la force des éléments, du mirage, et la solitude sous le ciel bleu transformé en enfer. La mise en scène se pare de belles images loin de celles de Survivre avec ses ciels gris et son océan de fureur. C’est sans aucun doute ce qui lui manque, il se dilue dans le bleu du ciel et de l’océan, en oubliant la nuit sombre et menaçante. C’est le ciel étoilé d’une chambre de petite fille rêvant de l’infini où clignotent les petites lumières de l’espérance. C’est avant tout un film pour le grand public qui trouvera son lot de sensations et d’espérance face à la mort, bien calé dans son fauteuil.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus
Making of
Titre français : À la dérive
Titre québcois : En pleine tempête
Titre original : Adrift)
Réalisation : Baltasar Kormákur
Scénario : Aaron Kandell, Jordan Kandell et David Branson Smith, d'après le roman Red Sky in Mourning: A True Story of Love, Loss, and Survival at Sea de Tami Oldham Ashcraft et Susea McGearhart
Photographie : Robert Richardson
Montage : John Gilbert
Musique : Volker Bertelmann
Production : Baltasar Kormákur, Aaron Kandell, Jordan Kandell et Ralph Winter
Sociétés de production : RVK Studios
Sociétés de distribution : STXfilms (États-Unis), Metropolitan Filmexport (France)
Pays d'origine : États-Unis
Langue originale : anglais
Format : couleur
Genres : Drame biographique, romance
Durée : 96 minutes
Dates de sortie : 4 juillet 2018
Distribution
Shailene Woodley (VF : Jessica Monceau) : Tami Oldham
Sam Claflin (VF : Axel Kiener) : Richard Sharp
Jeffrey Thomas : Peter
Elizabeth Hawthorne : Christine
Grace Palmer : Deb