Tout commence par un trésor caché par l'armée allemande dans le sud de la France dans une grotte sous-marine. Comme dans de pareilles occasions, il ne reste aucun témoin sauf un. Bien des années plus tard, nous retrouvons le commandant Dromart, alias le Monocle, fomentant une de ces bonnes vieilles ruses pour récupérer le magot. Les cadavres tombent sous les balles comme les canards par temps de chasse. On plombe sévère dans la profession de ces agents très secrets qui se reconnaissent tous.
Il faut dire que l'équipe se croise, aussi nombreux que les voitures, les jours de grande circulation à la Concorde. Suite à la mort du dernier témoin, l'emplacement de la cache secrète se retrouve entre les mains d’un artiste en possession du secret au milieu de tout ce micmac. La suite, c'est la course à l'artiste. Comme le dit le bonheur, l'armée et les beaux-arts ont toujours entretenu de mauvais termes. Il rêve d'une Rolls, les autres de documents secrets et d'un joli magot.
Il faut se méfier des femmes dans le milieu. La belle Anglaise, l’Italienne jouent de leurs charmes flous pour pigeonner nos machos. Nous rajouterons, le retour de la petite Allemande déjà entrevue dans l'épisode précédent. Il y a toujours un pauvre bougre au milieu du champ de tir. Ici c'est l'artiste qui joue le pigeon d'argile. Nous assisterons à un final de bataille sous-marine, qui inspira peut- être James Bond quelques années plus tard.
La nouvelle vague envoie tout valser, les vieux de la veille n’ont plus la cote. Lautner se voit reclassé au purgatoire. Il retrouve sa place grâce à la restauration des deux premiers Monocle, Mort d’un pourri, l’une des meilleures prestations de Delon, Le 7e juré qu’il considérait comme son préféré. Il nous faut revoir ces films, replacer Lautner à sa véritable place, notre mémoire se souvient de nombreux de ses films, le succès culte des Tontons flingueurs entre autres. Comme le disait Audiard : «J'ai eu la joie de collaborer à certaines de ces œuvres, pas à toutes, eh bien que j'y sois ou non, je retrouve ce ton très particulier qu'il faut bien à la fin des fins, appeler lautnerien. Lautner, ça existe.
Voilà. Il faut bien admettre que pour s'être imposé (et comment!) dans ce boulot où nulle réussite n'est le fruit du hasard, Lautner possède quelques petites qualités personnelles. Lesquelles ? Une complicité instantanée, presque magique, avec les comédiens, un amour minutieux du cadrage, une certaine passion pour la pyrotechnie, et surtout un sens prodigieux du rythme aidé par le fait (j'allais oublier ce détail!) que Georges Lautner est le meilleur monteur du cinéma français. Ce n’est pas si mal, tout ça.» Il n’y a rien d’autre à ajouter, tout est dit. Si Maurice Pialat est considéré pour le film dramatique et social comme un maitre par de nombreux réalisateurs, combien de réalisateurs de comédies actuelles, sans le savoir, doivent beaucoup à Lautner et son univers. Ils vous citent souvent Les Tontons flingueurs incontournable, mais omettent de nombreux autres titres de l’auteur.
C’est bien plus par son cinéma que par son nom qu’il marque notre histoire du 7e art. Dans ce second volet, c’est avec plaisir que nous retrouvons tous les ingrédients du premier, voir notre article. Il finit de peaufiner son style qui éclatera l’année suivante avec Les Tontons flingueurs et perdurera sur toute sa carrière. La parodie, l’humour noir occulteront d’ailleurs une grande partie de sa filmographie plus sérieuse comme Le 7e juré (1961) annonçant déjà les univers Chabrolien réalisant ses premier pas avec Le Beau Serge en 1959. Il est intéressant de voir combien l’univers du Monocle reste très moderne dans son esprit, voire son esthétique. Il nous reste à découvrir le dernier opus de la trilogie, Le Monocle rit jaune et imaginez qu’un jeune auteur s’en empare pour un remake saugrenu…
Patrick Van Langhenhoven
Bonus:
Nouvelle copie intégralement restaurée à partir d'un master 2K
Contient :
- le Blu-ray du film
- le DVD du film
Bande-annonce
Titre : L'Œil du Monocle
Réalisation : Georges Lautner
Scénario : Jacques Robert et Remy
Adaption : Jacques Robert et Georges Lautner.
Dialogues : Jacques Robert
Décors : Robert Boudaloux
Costumes : Paulette Ten-Have
Images : Maurice Fellous
Son : Antoine Archimbaud
Montage : Michèle David
Musique : Jean Yatove
Production : Lucien Viard
Sociétés de production : Les Films Borderie, C.I.C.C. (Raymond Borderie), Orex Films
Directeur de production : Paul Joly
Distribution : Pathé Distribution
Langue : français
Format : noir et blanc - 1,33:1 - mono - 35 mm
Genre : Espionnage, Comédie policière
Durée : 105 minutes
Première présentation le 14 novembre 1962
Distribution
Paul Meurisse : Le commandant Théobald Dromard, dit Le Monocle
Elga Andersen : Erika Murger
Robert Dalban : Poussin
Maurice Biraud : Martigue
Gaia Germani : Diana
Charles Millot : Commissaire Matlov
Raymond Meunier : Bob Dugoinneau
Paul Mercey : Schlumpf
Henri Cogan : Archiloque
Jean Luisi : Un 'sinistre'
Jean-Michel Audin : Un 'sinistre'
Josette Demay : la serveuse du restaurant
Michel Duplaix : un complice d'Archiloque
Richard Larke : Major Cyring
Barbara Brand : La danseuse tuée par erreur
Marcel Bernier : un homme de main d'Archiloque (non crédité)
Georges Lautner : Un officier allemand (non crédité)