Le jeune Ajatashatru ne connaît du monde et de ses couleurs, que celles de New Delhi en Inde. Il rêve de faire fortune, de voir Paris. Il croit que l’amour y est dix fois plus fort que n’importe où sur terre. Pour l’instant, le petit gamin des rues de Bombay se débrouille pour survivre dans un monde difficile. Il décide de suivre la voie des fakirs, maitres de l’illusion, du mensonge et de quelques vols. Au décès de sa mère, il part pour la capitale, bien décidé à montrer la capitale à ses cendres. Le premier arrêt est pour ce temple du meuble en kit et autres petites merveilles d’un grand magasin des pays du froid. C’est ici que le hasard s’amuse du fakir, en lui jouant un de ses tours malicieux. Il joue les Cupidon dans ce drôle d’endroit pour une rencontre. La romance ne choisit ni le lieu ni le moment, elle aime bousculer nos certitudes. Sans logis, il décide de passer la nuit dans une armoire Ikea après avoir laissé les cendres de sa maman dans un pot de décoration. C’est ici que tout part en vrille. L’armoire roule vers Londres. Il se retrouve en Angleterre avec des sans-papiers, croise à Rome la route d’une célébrité, s’envole en ballon et finit par revenir au point de départ en Inde. Et l’amour dans tout cela me direz vous ? Hop ! Envolé, disparu. C’est compter sans notre petit Cupidon farceur…
Il y a cinq ans paraissait le best-seller L’extraordinaire voyage du fakir écrit par Romain Puértolas. Ken Scott, le réalisateur de Starbuck succède à Marjane Satrapi sur un projet semblant plus difficile à monter qu’une armoire en kit. C’est une belle histoire rocambolesque pour toute la famille, parfois un peu naïve sur son regard sur l’émigration. Un peu comme leCandidede Voltaire, Ajatashatru découvre l’Europe bien malgré lui et son regard sur l’autre. Nous trouverons du Jules Verne Le tour du monde en 80 jours, du Dumas Le comte de Monte Cristo et bien d’autres références dissimulées. Une première partie nous entraine dans les rues de New Delhi dans une valse pleine de tours de fakir et de petites rapines pour survivre. Le rapprochement avec Slunmdog Millionaire en moins dramatique nous vient en tête. Nous retrouvons l’ascension d’un jeune homme pauvre, parti de rien qui finit par trouver une fortune bien plus belle que de l’or. L’extraordinaire voyage du Fakir joue sur plusieurs tons dans ce road movie malgré soi, la romance, et l’initiation entre autres.
Nous découvrons une séquence assez surréaliste dans le magasin Ikea, une drôle de manière de faire connaissance. Le film s’appuie sur un amour contrarié, impossible pour lancer notre fakir sur les routes de l’Europe. Certains reprocheront le regard bon enfant, naïf, porté sur les migrants. Il faut voir cette séquence comme un conte moderne. En ce sens, la fin dans le camp des émigrés y ressemble. Tout comme le vieil homme aveugle, il finira par voir bien plus l’âme du monde qu’un voyant. L’extraordinaire voyage du Fakir hésite entre le conte surréaliste, la comédie existentielle avec son ouverture, la romance, et le voyage initiatique. Il mélange les genres sans se perdre dans les méandres de son récit. Il jette une pièce dans la fontaine de La Dolce Vita à Rome, elles sont une constellation de rêve et d’espoir. L’amour est le fil central du récit celui de l’aimée, mais aussi des autres avec les migrants et ceux qu’il croise. Il apprend que le karma ne fait pas tout, nous sommes maîtres de notre vie et des routes à prendre. À la fin du voyage, quand on a écouté battre le cœur du monde, il nous faut rentrer chez nous. La leçon finale est que l’éducation fait de nous des gens riches. En s’accomplissant, les portes du bonheur et de l’éveil s’ouvrent. La mise en scène ne révolutionne pas le genre, mais se laisse déguster avec plaisir.
Patrick Van Langhenhoven
Titre français original : L'Extraordinaire Voyage du fakir
Titre international : The Extraordinary Journey of the Fakir
Titre français de travail : L'Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea
Réalisation : Ken Scott
Scénario : Luc Bossi et Romain Puértolas avec la participation de Jon Goldman, d'après le roman L'Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea de Romain Puértolas
Photographie : Maxime Alexandre
Costumes : Valérie Ranchoux
Décors : Alain-Pascal Housiaux et Patrick Dechesne
Montage : Philippe Bourgueil
Production : Aditi Anand, Luc Bossi et Jaime Mateus-Tique
Coproducteurs : Saurabh Gupta et Geneviève Lemal
Producteur associé : Luc Hardy
Sociétés de production : Brio Films, Vamonos Films, Paco Cinematografica ; coproduit par TF1 Studio, La Belle Company, Aleph Motion Pictures, Scope Pictures et Little Red Car Films
Société de distribution : Sony Pictures Releasing France (France)
Pays d'origine : France, États-Unis
Genre : comédie d'aventure
Durée : 96 minutes
Dates de sortie : 30 mai 20181
Distribution
Dhanush (VF : Pascal Nowak) : Ajatashatru Lavash Patel
Bérénice Bejo (VF : elle-même)
Stefano Cassetti : Alfredo
Barkhad Abdi
Erin Moriarty (VF : Lisa Caruso) : Marie
Seema Biswas
Abel Jafri
Edwin Gillet : Jerry
Gérard Jugnot (VF : lui-même) : Gustave
Mar Sodupe : inspecteur Fernandez