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affiche L’épreuve

L’épreuve

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Un film de Erik Poppe ,
Avec Juliette Binoche, Nikolaj Coster-Waldau,

Genre : Drame psychologique
Durée : 1h57
Norvège

En Bref

Rebecca saisit  l'instant fugace où les chants de paix deviennent des champs de mort. Photographe de guerre, elle traque, appareil en bandoulière, les conflits du monde prête à témoigner de l’horreur de l’humanité. Elle suit un groupe de femmes préparant un attentat en Afghanistan, quand le reportage se transforme en hurlements de mort. Prise dans la tourmente, atteinte, marquée dans sa chair, la douleur gravée dans son âme. Elle côtoie peut-être le diable une fois de trop ! Elle rentre au seul havre de paix, le port tranquille, la maison où rient les enfants, le foyer d’Ulysse, son Ithaque. Elle retrouve son mari, ses deux filles, attentionnés, prêts à tout pour effacer les meurtrissures de sa conscience.

Le corps, lui, se remet plus rapidement. Rebecca tente de se reconstruire, de fabriquer des parcelles de bonheur à emporter sur les champs de terreur. Elle oscille comme un vent sauvage entre la brise et la tempête, entre les vivants et les passagers de la mort. Les blessures sont trop profondes, l’appel plus fort que l’amour. Il faut repartir, témoigner, de nouveau arracher au mensonge la vérité. Peu à peu le paisible silence des meurtrissures, la maison du bonheur, se troublent des fantômes de la mort. Ils l’accompagnent dans chacun de ses gestes, l’imprègnent dans ses tentatives pour reprendre pied en territoire connu.

« Tu prends l’avion. Tu vas on ne sait où. Tu reviens, on est heureux. Mais tout ce temps, tu attends ton prochain shoot. Il faut que tu saches que tes filles vivent avec la peur que leur mère meure. » C’est tout ce que les vivants peuvent lui hurler. Quand la colère gagne sur l’amour, il ne reste plus qu’à retourner sur l’incendie pour l’éteindre, mais le peut-on vraiment ? Il existe toujours sur cette terre un brasier en attente que l’on témoigne de sa fureur.


« Tu pues la mort ! » Marcus le marie de Rebecca

 Au-delà du drame familial qu’il soulève, tragédie antique, Erik Poppe nous interroge plus en profondeur sur le sens du métier de photographe de guerre. Les photos prises peuvent-elles soulever les consciences ? Qu’est-ce qui fait courir les photojournalistes, au péril de leur vie, souvent au détriment de leurs liens familiaux et sentimentaux ? L’épreuve est d’abord l’histoire d’une incompréhension, celle de Rebecca (Juliette Binoche) et de son combat pour témoigner de la guerre et de son horreur. Celle d’une famille qui attend le retour de l’amour de la mère. C’est le prix à payer pour le reporter de guerre, quand le témoignage, la vérité, la colère dévorent tout le reste.

C’est bien tout ce qu’il ramène dans ses bagages. Cela finit par déteindre sur son quotidien. Il n’offre pas des guirlandes de lumières ou des jouets pour les enfants. Il dépose la peur, la violence et le sang des innocents au pied du sapin. Rebecca est habitée par un devoir plus grand que celui de sa famille. Elle voudrait qu’elle soit plus présente, que son amour s’incarne par des mots et des gestes de bonheur. Les fantômes qu’elle ramène ne lui laissent pas le choix d’autres visions que des champs de lave et d’explosion. L’enfer vous marque de sa malédiction au fer rouge à tout jamais, pas moyen de revenir en arrière. C’est le fossé se creusant entre une mère et une fille, comment la seconde finit par comprendre l’importance de la mission et la perte trop vive.

 « C’est par colère que j’ai photographié la mort, ça me permet de me calmer. » Rebecca à sa fille

 La souffrance se trouve dans les trois camps, celle de la famille, de la photographe, des conflits. Le film pose une nouvelle fois la question de l’intervention. Jusqu’où le témoin peut-il rester simple spectateur ? C’est en passant par la mort qu’elle comprend que quelque chose a changé dans sa façon de regarder la misère du monde. Il apparait parfois un devoir plus grand qu’une photo, celui d’éviter qu’elle existe. Quelle frontière entre la photographie d’un attentat suicide, la mise en scène d’une mort annoncée et la complicité avec l’acte perpétré ? Il ne devient pas en bout de piste un créateur de guerre. Juliette Binoche donne toute la force du combat intérieur à son personnage, écartelé, tiraillé, meurtri par un ouragan qui le traverse pendant tout le film. Elle ne sera plus jamais en paix nulle part.

Quand on franchit le Rubicon, le pays d’Hadès, on se condamne à un enfer intime éternel. Érik Poppe s’inspire de son expérience de reporter-photographe de guerre dans les années 1980. Il part d’une scène violente prenant le spectateur dans ses griffes, l’Afghanistan, couleur de désert et de feu. Rebecca de noir vêtue, peut-être la mort elle-même. Il utilise le gros plan des visages pour marquer cette promiscuité avec le néant et la folie. Ensuite le film ralentit, devient plus calme aux couleurs de prairie, le vert de l’espoir et le bleu de l’océan de nos origines primordiales. Quand avons-nous inventé la guerre et la haine ?

Il grave le temps des retrouvailles et de la tentative d’une allégresse ineffable. Les plans englobent l’espace, la famille, le bonheur est infini. Il passe par le retour au conflit, camp de réfugiés, tentes caressées par le vent et la colère de nouveau. Il se termine par une plage, la solitude et les lumières de la ville au loin. C’est un film initiatique où chacun progresse dans son incompréhension pour se rapprocher de l’autre et assumer sa propre route.

 Patrick Van langhenhoven

Note du support :
2
Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 2.39, Format DVD-9
Langues Audio : Anglais Dolby Digital 5.1, Français Dolby Digital 5.1, Français DTS 5.1
Sous-titres : Français
Edition : Septième Factory

Bonus :

Juliette Binoche, photographe de guerre (2')
Nikolaj Coster-Waldau, de Game of Thrones à l'Épreuve (5')

    Titre original : Tusen ganger god natt

    Titre français : L'Épreuve

    Réalisation : Erik Poppe

    Scénario : Erik Poppe et Harald Rosenløw-Eeg

    Pays d'origine : Norvège

    Format : Couleurs - 35 mm - Dolby Digital

    Musique : Armand Amar

    Genre : drame

    Durée : 117 minutes

Distribution

     Juliette Binoche (VF : elle-même) : Rebecca

    Nikolaj Coster-Waldau (VF : Damien Boisseau) : Marcus

    Maria Doyle Kennedy (VF : Marie-Frédérique Habert)

    Chloë Annett : Jessica

    Lauryn Canny : Steph

    Carl Shaaban : Courier

    Bush Moukarzel : Brian

    Adrianna Cramer Curtis : Lisa

    Eve Macklin : la petite amie de Brian

    Anna Leah Thorseth Poppe : l'ami de Steph

    Denise McCormack : la voisine

    Stephen Mullan : le réceptionniste