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affiche Inherent Vice (avis 2)

Inherent Vice (avis 2)

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Un film de Paul Thomas Anderson ,
Avec Joaquin Phoenix, Josh Brolin, Owen Wilson,

Genre : Policier
Durée : 2h29
États-Unis

En Bref

 Découvrir que Thomas Pynchon, l’un des romanciers américains contemporains majeurs, n’ait jamais été adapté peut paraître surprenant ou laisser présager qu’au-delà de son talent, son style est difficilement conciliable avec le grand écran. L’une des spécialistes de l’auteur, l’universitaire Bénédicte Chorier résume cela dans le simple titre de sa thèse : « Le badass et l’excentrique : de la subversion chez Thomas Pynchon ». Thomas Pynchon écrivain de l’excentrique, Thomas Pynchon écrivain de la subversion.

  Il n’en fallait pas tant à Paul Thomas Anderson, pour se lancer dans ce défi, sur le terrain immaculé du roman hippie, Inherent Vice, sorti en 2009. Les affiches, à la façon de La Cène de de Vinci version plus moderne et fluo, avec Joaquin Phoenix en Jésus plantaient le décor et l’ambiance de cette histoire qui semblait être écrite pour le réalisateur américain.

 Son précédent film The Master n’était pas un échec à proprement parler. Mais il lui fallait un second souffle, alors que le souvenir de ses Magnolia et surtout There Will Be Blood trottait encore dans nos têtes. L’histoire se résume simplement mais est d’une complexité par sa narration et les dérives de son personnage.

Larry Sportello se faisant appeler « Doc » est un détective privé hippie, abusant de drogues. Un soir, son ex-copine apparaît, quand ses sentiments eux n’ont jamais disparu, et lui demande de l’aide dans une mystérieuse affaire : éviter un plan machiavélique pour son amant, le milliardaire Wolfmann.

  On ne sait pas, comme Doc d’ailleurs, si c’est un rêve ou non, si elle est vraiment là devant lui. Dès le début, la perte de repères, de sens, se fait ressentir, et l’affaire policière n’est qu’un prétexte à la description de ce monde hippie. Tout le film sera un condensé d’interrogations sur la réalité ou non.


Cette ambiguïté dans des scènes absurdes, où l’ironie est constamment présente, pourrait être la réussite de la mise en scène de cette société des années 70, en Californie. La comparaison entre ce tableau et le film d’Anderson prend alors son sens rapidement. Le film ne se vit pas, mais se regarde comme un tableau. L’image colorée n’est pas due à un coup de pinceau, mais aux acides, que les personnages ingurgitent tout au long du film. Finalement la question n’est pas de savoir si ce que l’on voit à l’image est ce que Doc ressent, ce qui pourrait être une réussite, mais de comprendre ce qu’a voulu faire le réalisateur.

  Et là, c’est à The Master qu’on pense : encore une fois, Paul Thomas Anderson fait son film dans son coin, tente au mieux d’adapter l’œuvre, mais laisse beaucoup de choses sur le côté, dont nous, pauvres petits spectateurs. Ici, le flot d’images et de délires du protagoniste, plus largement du réalisateur, se prend de façon hermétique, sans interaction. Si ce n’est quand même par les acteurs et notamment Joaquin Phoenix, à la bonne place sur le tableau. S’affirmant à juste titre comme le chef de file de cette génération, il nous avait touchés avec Her de Spike Jonze l’an passé, ici la sympathie et l’admiration restent intactes. Les Josh Brolin, Owen Wilson et Cie, formant la petite communauté mystérieuse et incomprise, offrent des traits particuliers et travaillés.

 Dans une mise en scène très stylisée ponctuant de superbes plans et avec une belle photographie, il est difficile de faire face à ce monde hippie : perdu, il faut se raccrocher à quelques fulgurances plus présentes dans la mise en scène et la direction d’acteurs. La portée de l’œuvre, elle, se trouve de façon trop brève dans l’une des choses que le cinéma montre le mieux : le temps qui passe, le monde changeant. Et c’est à la fin, notamment, que les belles images prennent leur sens. Le monde haut en couleur, où la liberté était le mot d’ordre et les interrogations sociétales plus légères, entre en confrontation avec les dures réalités et les apparitions de nécessités.

  Le « destin américain » n’était pas celui-là. Bonjour la fin de l’utopie, la fin du monde hippie et l’annonce de la société américaine contemporaine. C’est peut-être ce qu’il faut retenir de ce film, où le roman Pynchon n’est pas suffisamment exploité, ou trop et ce qui donne un côté incompréhensible, comme dans le livre. L’inconstance empêche Inherent Vice de décoller et c’est à nous de faire l’effort, dans ce film, peu généreux et ouvert, pas à la hauteur de l’histoire de ces Etats-Unis, riches en mutations et périodes atypiques, qui plus est réalisé par l’un de ses amoureux et spécialistes.

Clément SIMON

Note du support : n/a
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Sous-titres :
Edition :


Titre original : Inherent Vice

    Réalisation : Paul Thomas Anderson

    Scénario : Paul Thomas Anderson, d'après Vice caché (Inherent Vice) de Thomas Pynchon

    Décors : David Crank

    Direction artistique : Ruth De Jong

    Costumes : Mark Bridges

    Montage : Leslie Jones

    Musique : Jonny Greenwood

    Photographie : Robert Elswit

    Production : Paul Thomas Anderson, Daniel Lupi et JoAnne Sellar

    Sociétés de production : Ghoulardi Film Company et Warner Bros.

    Sociétés de distribution : Warner Bros. (USA)

    Pays d’origine : États-Unis

    Budget :

    Langue originale : anglais

    Durée : 148 minutes

    Format :

    Genre : Film policier

Distribution

     Joaquin Phoenix : Larry « Doc » Sportello

    Reese Witherspoon : Penny

    Josh Brolin : Bigfoot Bjornsen

    Owen Wilson : Coy Harlingen

    Benicio del Toro : Sauncho Smilax

    Sasha Pieterse : Japonica Fenway

    Martin Short : Dr. Blatnoyd

    Kevin J. O'Connor

    Katherine Waterston : Shasta

    Jeannie Berlin : la tante Reet

    Joanna Newsom2