Rie est une journaliste effectuant un reportage sur la construction du métro de Copenhague. L’objectif est de mettre en valeur la coopération européenne autour du projet et des travailleurs venus du fin fond de l’Europe. Elle saisit l’instant du labeur avec son appareil photo et les mots d’un voyage en exil pour certains. Elle se retrouve au cœur des profondeurs près de la machine qui éventre la terre pour creuser le tunnel. Elle rencontre Ivo, un Croate spécialiste des foreuses et Bharan, un jeune Africain au parcours douloureux. Cette plongée sans risque au cœur de la terre se termine en catastrophe, quand un incendie bloque la jeune femme et les deux hommes dans le sas de décompression. Jusqu’ici tout va bien, mais pour combien de temps ?
C’est le premier long métrage de Rasmus Kloster Bro, un jeune réalisateur danois, renouvelant en partie le cinéma claustrophobe. Il est difficile après Cube, Buried, Tunnel et bien d’autres, de dépoussiérer le genre. Pourtant, Rasmus Kloster Bro réussit à nous perdre dans le noir profond des tunnels du métro. La première partie ressemble à un film social sur la communauté européenne et sa capacité à travailler ensemble. C’est un regard juste sur ces hommes venus de toute l’Europe et de plus loin, exilés pour le travail. C’est le portrait de ces familles éloignées et l’isolement du travailleur pour offrir le meilleur aux siens. Ils acceptent des conditions d’éloignement et de travail difficiles que nous révèle la descente de Rie. Nous pensons à L’Enfer de Dante, source d’inspiration pour Rasmus Kloster Bro et peut-être à la Caverne de Platon pour notre part. Pour le premier, c’est la descente aux enfers qui s’achève par la découverte de la lumière et le prix de la vie.
On meurt et renait à un horizon plus large. C’est une vision du monde solidaire contre un autre, obscur et restreint, replié sur soi. Pour la Caverne, il existe ce que l’on voit, le vrai et le faux. Le faux, c’est ce que le monde à l’extérieur, celui de la surface, imagine de ces travailleurs venus d’ailleurs. Le voyage de Rie n’est pas de sortir, mais d’entrer dans la Caverne pour découvrir le vrai. À la fin, elle peut révéler au monde sa connaissance, sa vision nouvelle et juste. Il faudra garder toute sa raison pour se sortir de la nasse qui étrangle nos trois personnages. La deuxième partie est un film plus physique. Notre mental a déjà été mis à mal par les films nommés plus hauts. Rasmus Kloster Bro choisit de jouer sur le physique, les corps et leur souffrance prennent toute leur importance dans ce voyage sans retour.
C’est en cela qu’il innove et change le regard pour nous prendre au corps. Certes, l’exercice révèle des petites faiblesses, mais dans l’ensemble c’est plus une oppression qu’une perte de contrôle de notre esprit. Il préfère la voie de la solidarité à celle du chacun pour soi. Ils comprennent que la porte de sortie passe par un travail en commun comme la construction du métro. Exit nous révèle un réalisateur prometteur, capable de transformer la descente en enfer par une métaphore politique et sociale. C’est plutôt bien vu et gonflé.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : Cutterhead
Titre français : Exit
Réalisation : Rasmus Kloster Bro
Scénario : Rasmus Kloster Bro, Mikkel Bak Sørensen
Son : Peter Albrechtsen
Montage : Jakob Juul Toldam
Photographie : Martin Munch
Musique : Sos Gunver Ryberg
Production : Amalie Lyngbo Hjort
Société de distribution : Danish Film Institute
Distributeur France (Sortie en salle) : Damned Distribution
Pays d'origine : Danemark
Langue originale : Danois
Genre : Thriller
Durée : 1h24
Dates de sortie : 15 juillet 2020
Distribution
Christine Sønderris : Rie
Krešimir Mikić : Ivo
Samson Semere : Bharan