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affiche Dans les forêts de Sibérie

Dans les forêts de Sibérie

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Un film de Safy Nebbou ,
Avec Raphaël Personnaz, Evgueni Sidikhine,

Genre : Film d'aventure
Durée : 1h45
France

En Bref

Partir, tout quitter pour oublier le bruit débordant du monde qui nous entoure. Teddy souhaite redonner du sens à une vie qui s'égare dans la ville des incertitudes. Quand, tout devient pesant comme un fardeau trop lourd, il faut s'alléger. Il ne trouve rien de mieux que de passer du brouhaha de la ville à l'espace presque vierge des territoires désolés du bout du monde. C'est un petit lac gelé et une chaumière tranquille nichée à ses pieds qui l'appellent. Image bucolique d'un monde utopique jailli d'un imaginaire fécond. La réalité s'impose beaucoup plus rude, la petite maison du bonheur survit, comme ses habitants, au cœur de l'espace rude de Sibérie. Il voulait se retrouver seul face à son âme, reprendre le lien dans le vide qu'il remplira. Pour cela il est servi, rien à l'horizon, le premier voisin à des kilomètres, le vent rageur et la neige sans trace pour compagnons.

C'est le décor idéal pour toucher à l'essentiel, fuir le superficiel. Il ne cherche pas à oublier la société ni se fondre dans le cœur de la montagne pour y perdre son âme. Il veut juste retrouver le chemin de son être. La rencontre avec un autre voyageur perdu, oublié du monde transforme définitivement la quête. L'autre n'a pas choisi cette vie de reclus. Il se cache du monde pour une faute de trop. Les années à se terrer et résister au pire ne l'ont pas transformé en ermite spirituel. Il ne souhaite qu’une chose, revenir au sein des vivants. La rencontre entre ces deux quêtes apportera les réponses que cherchait chacun des deux hommes.


Dans les forêts de Sibérie s'intéresse à la place de l'homme dans notre société. Nous ne sommes pas dans l'idéologie de Thoreau, fuir le monde pour vivre en harmonie avec Dame Nature. Nous ne sommes pas dans la quête spirituelle pour l'épouser, s'y fondre et croasser avec les grenouilles comme le maître zen. Nous sommes loin de Into the Wild.  Teddy ne vient pas chercher des réponses. Il vient retrouver un ami perdu, lui-même. La nature est le décor et le lieu de confrontation qui permet à un homme de redonner un sens à sa vie. En venant dans l'espace rude au cœur d'un hiver rigoureux, l'animal, l'ours qui passe, deviennent la clef pour mieux se comprendre. Plonger dans l'eau glacée, patiner sur le lac gelé vous ramène à l'essentiel. Il est de passage, en transhumance de sa vie. L'autre, et nos rapports à l'autre sont la quête du cinéma de Safy Nebbou.

Il nous interroge sans cesse sur notre confrontation à nos instincts profonds, pervers ou non. La nature devient le théâtre vierge où celle-ci trouve sa pleine résonance. C’est le décor où inscrire son renouveau, reprendre en main son destin. En écho, il situe donc le personnage en fuite pour un acte qu'il aura eu tout le temps de méditer. C’est une retraite imposée face à celle voulue, désirée, de Teddy. Dans les forêts de Sibérie pose la question de notre place au sein du monde, entre la tentation de l'isolement conduisant à la béatitude et la folie de nos sociétés où trouver sa place. Safy Nebbou utilise avec justesse l'espace, entre sa nature brute vierge de toute trace humaine, lac à perte de vue, forêt hivernale aux arbres squelettiques, maison sans fard, tempête de neige où se perdre facilement.

Au centre, l'homme s'agite, tente de trouver les solutions à sa survie, quête l'oubli et finit par revenir. Il rajoute le second personnage, hommage à Dersu Uzala, film qui l’a profondément marqué. Déjà ses premiers courts métrages au cœur du Pays basque abordaient cette thématique. A l’inverse d’Alejandro Gonzalez Innaritu où la nature devient un personnage dans laquelle l’homme se fond, chez Safy Nebbou, elle devient un décor où plonger pour retrouver le chemin de l’humanité et de la civilisation. A l’inverse de certains réalisateurs contemplatifs, on ne s’attarde pas sur l’espace. Il ne le sublime pas. Une scène suffit à montrer qu’une tempête peut vous perdre facilement en allant chercher du bois. L’homme, même point ridicule, minuscule, perdu dans l’immensité, se retrouve dans presque tous les plans.

C’est ce point de vue qui est intéressant et change le message. C’est lui qu’il sublime dans l’espace originel, Teddy et sa trompette résonnant pour le néant. Comme Innaritu, à l’inverse de Malick, il ne transcende pas l’image floue, poétique, lumière rajoutée. Il reste naturel, minimaliste dans sa restitution, montrant ainsi la force des éléments et la beauté d’un coucher de soleil. C’est ainsi qu’il nous séduit et dévoile un réalisateur qui atteint un point de maitrise et de passage. Il est intéressant de voir au retour, dans le vacarme de nos civilisations, comment il nourrira son cinéma.

 Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
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Titre : Dans les forêts de Sibérie

    •       Réalisation : Safy Nebbou

    •       Scénario : Safy Nebbou et David Oelhoffen, d'après l'œuvre de Sylvain Tesson

    •       Musique : Ibrahim Maalouf

    •       Montage : Anna Riche

    •       Photographie : Gilles Porte

    •       Décors : Cyril Gomez-Mathieu

    •       Costumes : Anne David

    •       Directeur de production : Frédéric Sauvagnac

    •       1ère assistante mise en scène : Louna Morard

    •       Producteur : Philip Boëffard et Christophe Rossignon

    ◦       Producteur exécutif : Eve François Machuel

    •       Production : France 3 Cinéma, Zéphyr Productions et Nord-Ouest Films

    •       Distribution : Paname Distribution et Other Angle Pictures

    •       Pays d'origine :  France

    •       Durée : 105 minutes

    •       Genre : Film d'aventure

    •       Dates de sortie : 15 juin 2016

Distribution

    •       Raphaël Personnaz : Teddy

    •       Evgueni Sidikhine : Aleksei