C'est l'histoire de deux arnaqueurs à la TVA de Belleville, Alain Fitoussi et Bouli qui s'associent à Jérôme Attias, un milliardaire. Ces deux canailles sans grande envergure rêvent de décrocher le jackpot. Ça tombe bien, le gouvernement lance un nouveau marché écologique, la taxe carbone. Pour faire simple, chaque entreprise possède un quota de pollution. Les gros pollueurs peuvent racheter aux plus petits leur excédent de propreté. Le tout est soumis à la TVA. C'est là que se trouve la faille qui permet à nos deux cadors de trouver leur paradis de l'arnaque. Pour cela, ils ont besoin d'une mise importante. Ils embarquent un milliardaire, Jérôme Attias, qui amène la mise de départ. Celle-ci, comme dans un carrousel pour minots, une spirale exponentielle, des cercles dans l'eau, grossit de plus en plus, sans savoir où cela s'arrêtera. Heureusement pour l'Etat français, le magistrat Simon Weynachter, patron d'une nouvelle équipe d'enquêteurs, découvre le pot aux roses. C'est en dévoilant leur petite arnaque à la TVA qu'il lève un lièvre. Il ignore encore jusqu'où il peut courir...
Il n'est pas étonnant de voir Xavier Giannoli s'intéresser, après Olivier Marchal, à ce sujet très cinématographique. Il s'appuie sur le livre d'enquête D’argent et de sang de Fabrice Arfi en poche et au Seuil. Il rajoute des personnages fictionnels comme Simon Weynachter, remarquable Vincent Lindon, sa fille, une équipe d'enquêteurs solides, à l'américaine et des seconds rôles appuyant le récit central. La série permet de fouiller son sujet, ses personnages et de creuser plusieurs thématiques. Ce sont d'abord les affabulateurs en tout genre peuplant sa filmographie et le portrait d'une époque souvent proche de basculer, depuis À l'origine jusqu'à Illusions perdues. Il montre comment une idée, partant d'un bon sentiment écologique, finit par être pervertie. On suit l'affaire à travers le personnage de Simon Weynachter, un homme de conviction au service de l'Etat.
Au hasard d'une enquête sur les versements de la TVA, ce magistrat des douanes soulève une arnaque bien plus importante. Nous allons suivre sa quête d'une justice idéale confrontée à l'époque qui l'est moins, où l'argent est roi. Il devra sans cesse composer avec la machine étatique en n'hésitant pas à la contourner parfois. Vincent Lindon nous offre une composition magnifique dans une palette de sentiments variés. Nous retrouvons deux points récurrents, tout d’abord, l'explication de l'arnaque au carbone, complexe et ensuite, les rapports avec sa fille perdue qui l'appelle régulièrement avec un numéro masqué. Le premier peut paraître redondant, il renforce l'idée de ce carrousel répétitif, la mise de départ se multipliant à chaque fois. Le deuxième, plus personnel, nous en dit plus sur l'intégrité de Simon Weynachter et son incapacité à régler son problème. Il se débat non seulement avec le système pour son enquête mais aussi dans sa vie personnelle. C'est un homme proche de la rupture.
Face à lui, les protagonistes de l'affaire, deux arnaqueurs sans grande envergure de Belleville, découvrent l'arnaque du siècle. Un troisième larron intervient pour la mise de départ, un milliardaire avide de sensations. D'un côté des voyous rêvent de devenir milliardaires et d'un autre, un milliardaire de s'encanailler. Le film traite aussi bien du système et de ses failles et faiblesses, de la quête d'identité, que des classes sociales riche et pauvre. Les thématiques sont un écho à l'époque contemporaine. L'incommunicabilité est un autre sujet aussi bien entre les personnages qu’au sein du système. La mise en scène nous rappelle les grandes séries américaines avec leur esthétique particulière comme chez Dick Wolf, New York Unité Spéciale et ses déclinaisons. Du côté du cinéma, il faut chercher plus près de nous dans des films comme le Loup de Wall Street de Scorsese, Wall Street (1987) et JFK (1991) d'Oliver Stone. Pour sa première incursion dans l'univers des séries, Xavier Giannoli réussit un coup de maître.
Une série Création Originale CANAL+ disponible sur CANAL+.
Patrick Van Langhenhoven
crédit visuels © Curiosa Films et de l'affiche : © Canal+.