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affiche Anatomie d’une chute

Anatomie d’une chute

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Un film de Justine Triet,
Avec Sandra Hüller, Swann Arlaud, Milo Machado Graner ,

Genre : Drame psychologique
Durée : 2h30
France

En Bref

En un instant, tout bascule, tout plonge dans un néant, une faille dans le temps immobile. C'est une histoire qui s'achève dans la neige tachée de rouge. Sandra Voyter, Samuel Maleski et leur fils malvoyant Daniel, âgé de 11 ans, vivaient dans ce coin reculé au cœur de la montagne. Un lieu propice au calme et à la sérénité de l'artiste pour composer avec son art. Un couple ordinaire avec ses engueulades, ses fractures, ses blessures, mais aussi ses petits bonheurs faits de riens s'épanouissant dans le silence. La joie peut aussi dissimuler bien des douleurs profondes qui, avec le temps, ne se referment pas. Samuel, un jour comme une autre, bascule dans le vide, happé par la mort. La police se trouve devant une affaire complexe. Homicide ? Suicide ? Inconnu dans la maison ? Coup de sang de Sandra ? Commence une enquête fouillant dans les âmes de Sandra et de Daniel pour trouver la vérité. Dans ce théâtre de la vie, quelqu'un ment forcément - ou pas.


Justine Triet, Palme d'or à Cannes largement méritée entreprend un voyage à l'os, au plus près de notre pays intérieur pour débusquer la vérité. La mise en scène ausculte la parole, examine les lieux, sans fioritures, portée par une image touchant l'essentiel. Cette anatomie pourrait paraître sans profondeur, juste un puits sans fond de détails, examinée à la loupe, avec son langage procédural. Il n'en est rien. Au contraire, en touchant l'âme, le cœur des non-dits au plus près, c'est un autre éclairage bien plus complexe qui se dévoile, les maux à travers les mots. C'est l’enfant aveugle dont le regard n’est plus, mais il lui reste la parole et les autres sens. Il tente d'analyser ce territoire secret en chacun de nous. Nous sondons l’esprit, cette petite voix intérieure et ses silences.

Il reste les masques que nous portons tous, les acteurs que nous sommes sur le grand théâtre de la vie.
On décortique toute une existence pour tenter de comprendre le moment de rupture qui conduit à l’impasse de la mort. La langue, française, allemande, est une forme de pensée qui diffère d'un pays à un autre. La pensée est la partie obscure, intérieure, personnelle. La parole est l’extérieur, ce qu’on dit, qui n’est pas forcément ce que l’on pense. C’est une part de cette anatomie que dévoile le film. Est-ce que l’on peut tout entendre et tout gérer ? C’est ce que la juge dit à un moment à Daniel. Nous découvrons toute la complexité d’un couple qui passe par différents stades, complicité, colère, harmonie, chaos, sexe, silence. Le temps joue sur leur histoire et ses sentiments. Le sujet principal me semble être celui des mots, la parole plus que les gestes, nue, confinée dans le tribunal. Elle devient le huis clos central autour duquel d'autres planètes tournent, soufflent pour lutter contre l’oppression.

 Pourtant le film n’est jamais une mécanique intellectuelle. Les mots mènent aux sentiments, tout aussi complexes, donnant alors une autre lecture. Si on pouvait séparer les mots et les sentiments, nous aurions deux versions différentes. C’est impossible car ils sont le yin et yang, les deux faces de la même pièce, du même être, n’existant pas les uns sans les autres. L’écriture est une autre thématique en filigrane, encore les mots, ceux que l’on couche sur le papier. Un roman est-il la vérité d'une vie ou des passages d’une existence transformés par l’imaginaire ? Le titre définit bien le film, anatomie, autopsie pour comprendre une réalité qui nous échappe. Cette danse de vérité et de mensonge raconte une autre histoire. Cette anatomie change tout au long de sa progression, comme le temps, parfois orage, parfois brise, parfois pluie.

Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
Support vidéo : Pal, Couleur, Stereo 16:9 compatible 4/3
Langues Audio : DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0 stéréo
Sous-titres : malentendants.
Edition : Le Pacte

Bonus:

Cinq scènes coupées et alternatives, et présentation de Justine Triet, avec ou sans commentaire (40’). La réalisatrice donne les raisons qui ont justifié l’exclusion de ces scènes du montage final, notamment des huit prises de la dispute de Sandra et Samuel.

Anatomie d’un scénario, avec Justine Triet et Arthur Harari (32’). L’idée du scénario est venue de Terreur aveugle (See No Evil, Richard Fleischer, 1971) et du désir d’utiliser le genre du film de procès pour découvrir la personnalité de Sandra et la relation avec son mari en plaçant le spectateur dans la position d’un membre du jury. Le scénario (sans aucune référence au couple formé par les deux scénaristes) pose la question de l’égalité entre l’homme et la femme, un délicat équilibre : (« Le couple, c’est ne faire qu’un, mais lequel ? », disait Oscar Wilde). Les auteurs évoquent le rapport du son à l’image, l’apport de Sandra Hüller, de Snoop, un réel personnage du film…

Anatomie d’un film, avec Justine Triet et les producteurs David Thion et Marie-Ange Luciani (36’, un entretien conduit par Nicolas Schaller). Ils retracent l’évolution du scénario, la négociation du métrage et du temps exceptionnel alloué au casting, au tournage et au montage (un an de postproduction !), facilité par la qualité du scénario (que Gallimard a édité), les scènes à retourner, le succès du film à l’étranger…

Swann Arlaud et Milo Machado-Graner (21’, entretien conduit par Axel Cadieux). Les deux acteurs se souviennent de leur rencontre avec Justine Triet, de leur perception du scénario, de la longue préparation de Milo par Cynthia Arra, de celle de Swann Arlaud qui a assisté au procès aux assises d’une tentative de meurtre à la hache. Justine Triet est à l’écoute des acteurs qu’elle pousse parfois à sortir de leur zone de confort…

Antoine Reinartz et Vincent Courcelle-Labrousse, avocat et conseiller juridique sur le film (22’, entretien conduit par Axel Cadieux). Il est entré dans la peau du personnage, protégé par l’armure de sa robe, en cassant les codes et en s’appropriant l’espace de la salle d’audience, après une préparation au rôle par Cynthia Arra qui cumulait les fonctions de directrice de casting et de direction des acteurs.

Anatomie d’un procès, avec Vincent Courcelle-Labrousse (15’, entretien conduit par Axel Cadieux). Avocat, consulté avant l’élaboration du scénario, il résume les différences de conduite des procès aux USA et en France et leurs conséquences pour l’accusé.

Casting de Milo Machado-Graner (7’). Milo, 13 ans, n’a peur de rien.

Call back Milo Machado-Graner (3’) : il revient pour interpréter une scène particulièrement dramatique.

Antoine Reinartz (13’). Le casting de l’interprète de l’avocat général en deux prises.

Répétitions de Milo Machado-Graner avec Cynthia Arra, directrice de casting et Justine Triet (25’). Une minutieuse préparation du jeune acteur à son rôle, y compris de son interprétation d’Albeniz au piano.

Secrets de tournage avec le chien Snoop, avec Laura Martin, coach animalier pour le cinéma (8’). Laura Martin parle de la spécialité qu’elle exerce dans la petite structure qu’elle a créée. La performance du chien Messi, saluée à Cannes, a été préparée pendant un mois.

 Titre original : Anatomie d'une chute
    Réalisation : Justine Triet
    Scénario : Arthur Harari et Justine Triet
    Photographie : Simon Beaufils
    Décors: Emmanuelle Duplay
    Montage : Laurent Sénéchal
    Son : Julien Sicart, Olivier Goinard, Jeanne Delplancq, Fanny Martin
    Sociétés de production : Les Films Pelléas, Les Films de Pierre
    Société de distribution : Le Pacte
    Budget : 6,2 millions €
    Pays de production :  France
    Langues originales : français, anglais et allemand
    Genre : drame, policier
    Durée : 150 minutes
    Dates de sortie : 21 mai 2023 (Festival de Cannes) 23 août 2023 (sortie nationale)

Distribution
    Sandra Hüller : Sandra
    Swann Arlaud : Vincent
    Milo Machado Graner : Daniel
    Antoine Reinartz : l'avocat général
    Samuel Theis : Samuel
    Jehnny Beth : Marge
    Saadia Bentaïeb : Nour
    Camille Rutherford : Zoé
    Anne Rotger : la présidente
    Sophie Fillières : Monica
    Arthur Harari : l'animateur de l'émission littéraire

Distinctions
Récompenses
    Festival de Cannes 2023 : Palme d'or et Palme Dog
    Festival du film de Sydney 2023 : Prix du public GIO du meilleur long métrage narratif international
    Brussels International Film Festival 2023 : Prix du public de la Compétition Internationale

Nominations et sélections

Festival international du film de Toronto 2023 : sélection « Special Presentations »