C’est avant tout une histoire de mort et d’amour. Dans les années quatre-vingt-dix, un virus mortel poursuit depuis plus de dix ans sa pandémie mortelle. Dans l’indifférence totale, la maladie sape l’espoir d’une vie où l’amour n’aurait plus son mot à dire. Notre histoire commence au début des années quatre-vingt-dix, Nathan rejoint les rangs d’Act Up pour mener le combat et bousculer les consciences endormies. Des réunions chaudes où la parole élabore les outils de la lutte, des actions contre l’indifférence : c’est l’intervention musclée lors d’un congrès sur le sida, dans les labos profitant de la maladie, au cœur de la Gay Pride… La lutte est active, imaginative - poche de faux sang, corps allongés simulant la mort d’une jeunesse en partie libérée - mais sous le poids d’une épée de Damoclès impardonnable. Dans ce combat où l’urgence sonne le glas se retrouvent des homos et des hétéros, femmes et hommes, des hémophiles contaminés, des mères de séropositifs. Au cœur de la lutte Nathan s’éprend de Sean un militant séropositif actif. Il sait que la mort vient de frapper à la porte de sa vie et qu’elle ne se contentera pas de trithérapie pour s’enfuir. Il reste juste l’espérance, oublier le temps et vivre, vite et bien avant que ne sonne l’heure des adieux. Entre lutte et amour, Nathan et Sean ne laissent rien au temps qui passe, pas une goutte de minute perdue, avant que le vide n’étouffe tout, ne laissant que les souvenirs.
« Bienvenue à Act Up, créé en 1989 sur le modèle d’Act Up New York, n’est pas une association de soutien aux malades, mais un groupe d’activistes qui vise à défendre les droits de toutes les personnes touchées par le sida. »
Plus qu’un film militant et larmoyant comme on voudrait nous l’annoncer, c’est avant tout un coup de poing à la Philadelphia qui nous rappelle que la mort rôde toujours. Robin Campillo réussit en trois films un parcours sans faute et impressionnant. Il puise dans ses souvenirs de militants d’Act Up pour construire deux histoires qui s’entremêlent. C’est celle de la lutte, entre la ferveur des discussions dans un esprit de liberté et de partage. Nous comprenons mieux l’urgence de la lutte quand la pandémie menace toute une partie de la société. Alors que la libération sexuelle et l’homophobie reculent un peu, la maladie vient perturber cette liberté nouvellement acquise. Sean et Nathan choisissent de vivre leur amour jusqu’au bout, sans tabou avec cette faucheuse au-dessus de leurs ébats. La mort pourtant omniprésente est repoussée par la force de la vie, grande gagnante de ce combat.
La mise en scène oscille entre le document fiction pour la partie Act Up et la romance où les corps jouent la farandole du bonheur, oubliant les ténèbres, avec un certain onirisme, comme cette scène où les poussières deviennent le virus ou la joie. L’oubli sur la piste de danse annonce la fin de la danse, la mort plane sur nous. La scène coule rouge comme la couleur de la commune, du sang, rappelant l’un des porteurs de la contamination. Les acteurs semblent portés par la cause à défendre, dépassant toute appartenance à une quelconque catégorie. Il pointe du doigt l’inertie à agir devant un fléau qui dépassera la communauté gay ou toxico. Il n’existe aucun jugement dans ce constat que fait le film, même s’il pointe du doigt certains travers. Le jeune Nahuel Perez est époustouflant dans le rôle de Sean, magnifique de justesse dans sa colère et dans sa fin inéluctable. Plus que la mort et les larmes, nous retiendront ses 120 battements d’un cœur qui danse, se saoule de la vie pour oublier la mort.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus:
Commentaire audio de Robin Campillo
Répétitions des pom-pom girls
Bande annonce
Titre original : 120 battements par minute
Titre international : 120 Beats per Minute
Réalisation : Robin Campillo
Scénario : Robin Campillo, en collaboration avec Philippe Mangeot
Décors : Emmanuelle Duplay
Costumes : Isabelle Pannetier
Photographie : Jeanne Lapoirie
Son : Julien Sicart
Régie générale : Julien Flick
Montage : Robin Campillo
Musique : Arnaud Rebotini
Production : Hugues Charbonneau et Marie-Ange Luciani
Sociétés de production : Les Films de Pierre ; Page 114, France 3 Cinéma et Memento Films Production (coproductions)
Société de distribution : Memento Films distribution
Pays d'origine : France
Langue originale : français
Format : couleur
Genre : drame
Durée : 135 minutes
Dates de sortie : 20 mai 2017 (Festival de Cannes) ; 23 août 2017 (sortie nationale)
Distribution
Nahuel Pérez Biscayart : Sean
Arnaud Valois : Nathan
Adèle Haenel : Sophie
Antoine Reinartz : Thibault
Aloïse Sauvage : Eva
Felix Maritaud : Max
Mehdi Touré : Germain
Simon Bourgade : Luc
Ariel Borenstein : Jérémie
Théophile Ray: Marco
Catherine Vinatier: Hélène
Saadia Ben Taieb : la mère de Sean
Simon Guélat : Markus
Jean-François Auguste : Fabien
Coralie Russier : Muriel
Yves Heck : le professeur de français
Emmanuel Ménard : le proviseur
Pauline Guimard : une prof
Distinctions
Récompenses
Festival de Cannes 2017 : sélection officielle5
Grand Prix du Jury
Prix FIPRESCI du Festival de Cannes
Queer Palm
Prix François-Chalais
Festival du film de Cabourg 2017 : Prix du Public6
Out d’or de la création artistique7.
Nominations
Festival de Cannes 2017 :
Prix du scénario
Prix du jury
Prix de la mise en scène