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La rentrée cinématographique

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Genre : Ciné région

L'Actu

Depuis quelques années maintenant, on ne peut plus véritablement parler de « rentrée cinématographique de septembre », comme on le fait pour la rentrée littéraire. En effet, la saison estivale étant devenue une saison propice pour attirer des spectateurs dans les salles obscures, les distributeurs n’hésitent plus à sortir leur film en juillet et août. La pandémie a bien sûr changé la donne. Hormis quelques sorties de films en VOD, le lundi 22 juin sonne enfin l’heure de la reprise dans l’hexagone. Cependant, les entrées restent encore très timides, malgré une offre de qualité : « Be natural, l’histoire inédite d’Alice Guy-Blaché », « Benni », « Cancion sin nombre », « Filles de joie », « Green boys », « Nous, les chiens… », « L’ombre de Staline », sans compter sur les reprises du mois de mars : « La bonne épouse », « La communion », « Femmes d’Argentine », « De Gaulle », « Radioactive », « Une sirène à Paris », « Un fils », « Vivarium »… Le nombre d’entrées ne retrouvant les chiffres d’antan, certains cinémas se voient contraint de supprimer quelques séances pour n’ouvrir leurs portes qu’en fin de journée.

Les mois de juillet et d’août proposent pourtant des films qui auraient suscité, en temps normal, l’intérêt des spectateurs ; pour ne citer que quelques-uns (par ordre de sortie) : « Irrésistible », « Jumbo », « Les parfums » ; « Lucky Strike », « Malmkrog », « Abou Leila », « La nuit venue », « Le sel des larmes », « The king of Staten Island », « The climb », « Hotel by the river », « Chongqing blues », « Le défi du champion », « Eva en août », « L’infirmière », « Light of my life », « The perfect candidate », « Voir le jour », « A perfect family », « Mano de obra », « Mignonnes », « La troisième femme », « Dans un jardin qu’on dirait éternel », « Petit pays », « Une barque sur l’océan »…

Sans oublier « Eté 85 », le premier film « labélisé Cannes » à sortir, le très attendu nouveau François Ozon (réalisateur injustement oublié à la dernière cérémonie des César pour « Grâce à Dieu »).

Les comédies étaient également au rendez-vous cet été, à commencer par « Tout simplement noir », « Divorce club », « Adorables », « Terrible jungle », « Les blagues de Toto », « Effacer l’historique ».

Et bien sûr, le film que tout le monde attendait, plusieurs fois repoussé, et qui après un suspens terrible et qui aura tenu en haleine tous les amoureux du 7è Art, sort enfin le 26 août, « Tenet » (ou si l’on préfère « teneT », si on lit le titre dans l’autre sens !) C’est un peu comme si, Christopher Nolan, réalisateur britannique à succès (« Interstellar », « Inception », « Dunkerque »…), 50 ans en juillet, devait à lui seul porter sur ses épaules le retour en salle des spectateurs du monde entier ! Objectif que certains n’ont pas hésité à comparer à l’arrivée du messie. Objectif atteint, la Warner Bros. peut souffler ! (1)

Peu de sorties en revanche ce mercredi 2 septembre 2020, soit cinq nouveaux films à l’affiche, contre onze en 2019, neuf en 2018 et quatorze en 2017. On notera toutefois que trois d’entre eux sont réalisés par des femmes : Anne Fontaine, Sophie Letourneur et Sophie Deraspe. C’est important de le souligner, c’est plus que la parité.

Si ce n’est pas à première vue le sujet central, la famille tient une grande place dans ces différents films et l’annonce d’un bébé (qu’il soit : attendu, non désiré, caché ou adopté) l’est aussi.

« Antigone » de Sophie Deraspe. La réalisatrice canadienne revisite la tragédie grecque écrite par Sophocle en 441 av. J.C. Si celle-ci conserve tous les prénoms des protagonistes, elle adapte les situations à notre société. Ainsi chez Sophocle, Antigone réclame-t-elle une sépulture digne pour Polynice ; dans le film, la jeune fille sauve son frère bien aimé d’une mort certaine, et devient ainsi le symbole de la rébellion pour toute une génération. Le film est bouleversant et remarquablement interprété par son actrice principale, Nahema Ricci.

« Ema » de Pablo Larrain. Le réalisateur chilien nous plonge dans la vie d’un couple désuni, elle est danseuse, lui est chorégraphe. Ils ne se sont pas remis de l’abandon de leur fils adoptif. Elle se consume, s’enflamme dans des ballets contemporains comme dans sa vie. Mais à force de tout brûler, on a du mal à suivre le parcours chaotique d’Ema, ni être en empathie.

« Enorme» de Sophie Letourneur. Parfois grand oublié dans la maternité, Sophie Letourneur remet le père au centre de la grossesse. Tourné avec le véritable personnel hospitalier, la réalisatrice nous propose une histoire exubérante et drôlissime, en partie due au jeu d’acteur de l’excellent Jonathan Cohen, mais aussi celui de Marina Foïs.

« Poissonsexe » d’Olivier Babinet. Avec un tel titre, ce film ne pouvait que sortir le 1er avril, et c’était le cas, si la crise sanitaire n’avait pas balayé toutes les sorties ciné, dommage. Ou comment un célibataire, en désir d’être père, travaille dans un laboratoire chargé de redonner à deux petits poissons l’envie de s’accoupler. Il y a aussi l’histoire de Miranda - la dernière baleine du monde -, le sauvetage d’un étrange poisson à pattes… Gustave Kervern et India Hair, vont unir leur solitude, dans cette fable fantaisiste prophétique mais tellement attendrissante.

« Police » d’Anne Fontaine. Adapté du roman d’Hugo Boris, paru chez Grasset en 2016, Anne Fontaine suit trois flics missionnés pour reconduire un réfugié à la frontière. Articulé en quatre chapitres (des prénoms des trois flics et de l’étranger), le film explore les consciences des personnages face à l’ordre qui leur a été donné. Et si la nouvelle vie qui arrivait avait ébranlé les convictions de l’un d’eux, jusqu’à influencer les deux autres…

(1)         948 378 spectateurs en salle en France, avant-première + places payantes du 24 août au 1er septembre / Chiffres du Film Français n°3929, daté du 4 septembre 2020.

Véronique Regoudy-Bazaia